Les inondations, bien que régulières dans certaines régions du sud de la France, restent des phénomènes plutôt rares, en tout cas dans le bassin parisien. Néanmoins, elles ont un impact important tant en matière de protection des personnes que de protection de l’environnement et leurs effets sont dévastateurs. Elles touchent fortement le tissu urbain : la voirie, les habitations, les zones commerciales et les entreprises. En ce qui concerne ces dernières, celles dont l’essentiel de l’activité se situe au rez-de-chaussée se trouvent être les plus touchées et les plus sinistrées. Le bilan est souvent très lourd aussi bien économiquement, en raison de l’arrêt total de l’activité sur une période pouvant durer plusieurs jours, ainsi que du coût de la remise en état, qu’humain et environnemental. En effet, les inondations représentent un danger pour les personnes, danger qui peut s’avérer mortel : chaque année on dénombre plusieurs décès dus à ces phénomènes, plus souvent causés par des noyades ; mais aussi un danger sanitaire en raison des contaminations laissées dans les locaux après que l’eau s’est retirée. De plus, très souvent, des matières dangereuses se répandent dans les eaux, puis dans les sols, causant des pollutions souvent bien plus considérables qu’on ne pourrait le penser de prime abord.

L’étude se focalisera plus particulièrement sur les conséquences écologiques causées par une inondation. Il est plus habituel que la protection des personnes soit traitée en priorité, ce qui semble logique. Néanmoins, les impacts environnementaux qui en résultent sont si importants, qu’il convient ici de les étudier plus en détail. Ils ont en effet un impact aussi bien sur le plan économique pour une entreprise que sur le plan sanitaire. La prise en compte environnementale du problème posé par les inondations est donc également un enjeu important pour la protection des personnes.

Les inondations sont des phénomènes inévitables, mais dont les conséquences négatives peuvent toutefois être limitées, à condition de mettre en place les mesures nécessaires. L’idée de les encadrer juridiquement est en réalité ancienne en France, puisque des édits royaux prévoyaient la construction de digues, dès le Moyen Âge. Plus tard, en 1807, une loi est venue régir l’assèchement des marais. Puis au XXème siècle, plusieurs lois sont apparues pour anticiper ces phénomènes, dont la loi Barnier du 2 février 1995 créant le plan de prévention des risques (PPR) et instaurant un fonds pour la prévention des risques naturels majeurs. Enfin, une directive européenne a édictée pour permettre d’améliorer la gestion du risque d’inondation de manière harmonisée en Europe, ainsi que pour limiter les impacts sanitaires, environnementaux et économiques qui en résultent. C’est la directive 2007/60/CE, dite « Inondation », du 23 octobre 2007, transposée en France par la loi Grenelle II de 2010, codifiée aux articles L. 566-1 à L. 566-13 du code de l’environnement.

L’article L. 566-1 du code de l’environnement définit les inondations comme étant des submersions temporaires par l’eau de terres émergées, quelle qu’en soit l’origine, à l’exclusion des inondations dues aux réseaux de collecte des eaux usées, y compris ceux utilitaires. Le texte ajoute que sur le littoral, une submersion marine est considérée comme étant une inondation si elle s’étend au-delà des limites du rivage de la mer. Enfin, il définit également le risque d’inondation comme étant la combinaison de probabilités de survenue d’une inondation et de ses potentielles conséquences négatives pour la santé, l’environnement et les biens, comprenant ici le patrimoine culturel et l’activité économique.

Il existe ainsi différents types d’inondations : celles causées par un montée des eaux d’un cours d’eau, encore appelées les crues, celles causées par tempêtes au bord des côtes, comme ce fut le cas sur la côte Atlantique avec la tempête Xynthia de février 2010, ou encore celles causées par de fortes intempéries à répétition, comme celles qui se sont déroulées en août 2015 dans la région de Montpellier. Ce seront les risques de crues qui seront le plus étudiées ici, en raison de leur fréquence d’apparition rare, mais très impressionnante et dévastatrice. Prenons l’exemple de la crue référence en Île-de-France, celle de la Seine en janvier 1910 à Paris, qui dura pendant plusieurs jours et inonda totalement de nombreux quartiers de la capitale. Si depuis la deuxième moitié du XXème siècle ces phénomènes ont commencé à fortement se raréfier, leur survenance est encore probable et même certaine en raison des changements climatiques engendrés depuis, si bien qu’une crue du même acabit voire même plus importante que celle de 1910 est à redouter. Une telle crue est considérée comme centennale, c’est-à-dire qu’il y a une chance sur cent chaque année qu’elle réapparaisse, d’où l’intérêt qui s’impose naturellement d’étudier les risques de crue sous ce titre.

Il convient donc que les entreprises prennent en compte le risque de crue. Mais quelles mesures peuvent-elles mettre en place pour préserver au mieux l’environnement ?

En matière de crue, il faut respecter plusieurs étapes pour éviter avec efficacité que ne survienne le moindre dommage, quand bien même l’absence totale de dommages relève plus de l’utopie que de la réalité. Si la protection des personnes compte énormément dans la procédure à suivre, c’est sur la protection de l’environnement que nous nous intéresserons dans la suite de ce raisonnement. Mais avant cela, il convient de définir la crue. Cette dernière correspond à l’augmentation du débit d’un cours d’eau, évalué en m3/seconde. Elle a donc pour conséquence la montée du niveau de l’eau, comme l’illustre si bien la crue de la Seine de 1910. Les communes concernées ont pour devoir d’indiquer des repères de crue visibles facilement depuis la voie publique, à plusieurs endroits de la municipalité, comme l’impose l’article L. 563-3 du code de l’environnement, les repères de crue étant les indicateurs de niveaux atteints par les plus hautes eaux connues (article R. 563-14 du code de l’environnement). Le reste des dispositions concernant ces repères ne prévoyant de contraintes qu’aux maires de zones à risques de crues, il ne semble alors pas utile d’approfondir plus sur la question.

Pour pallier au mieux aux inconvénients causés par une crue, les entreprises doivent en premier lieu prendre conscience du risque qui existe. Cela se caractérise par une prise de connaissance du plan de prévention des risques d’inondations (PPRi), document constituant une servitude d’utilité publique opposable à toute personne et émanant de l’autorité publique, dont le but est d’évaluer les zones présentant des risques d’inondation en y proposant des remèdes aussi bien techniques que juridiques. Ce plan peut être prescrit sur le territoire d’une seule commune et prévoit un zonage scindé en deux catégories : une zone de danger (zone rouge) et une zone de précaution (zone bleue) ; zonage pris en fonction de l’importance du risque d’inondation et contrôlé par le juge administratif. Il est aussi possible de consulter le Document d’Information Communal sur les Risques Majeurs (DICRIM). Les entreprises doivent ainsi prendre connaissance de la zone dans laquelle elles se trouvent, afin d’évaluer les risques pouvant survenir sur leurs installations. Par ailleurs, cette prise de conscience passe aussi par une information régulière du seuil de vigilance de crue édicté par le gouvernement via Météo France. Ce seuil est représenté par une échelle de quatre niveaux en fonction du danger pouvant être atteint : vert, jaune, orange et rouge.

En second lieu, il convient que les entreprises mettent en place des moyens de prévention, en raison de l’ensemble du matériel risquant d’être détruit et des produits dangereux susceptibles de causer de graves dégâts environnementaux. Il est ainsi nécessaire de faire un inventaire précis de ce qui se trouve sur le site, en répertoriant le matériel pouvant être déplacé et celui qui ne peut pas, également en prenant en compte les dangers environnementaux qu’ils risquent de causer et en trouvant les moyens adéquats pour leur mise en sécurité, sur site ou en-dehors. Cet inventaire est une part essentielle du travail à réaliser en prévention du risque de crue car il va permettre d’obtenir une vision concrète de l’ensemble des choses à sécuriser et ainsi de déterminer les ordres de priorité. Certains biens, non mobiles, en tout cas dans l’urgence d’une crue, devront être pris en charge en amont, afin d’éviter toute contamination des eaux. C’est le cas par exemple des cuves d’huiles usagées ou de carburant, qui devront être vidangées, nettoyées et parfois même lestées en ce qui concerne celles qui sont enterrées, afin d’éviter qu’elle ne cède avec la montée des eaux provenant de la nappe.

Pour ce qui est des produits déplaçables, il convient également de trouver des lieux pour les stocker, soit en-dehors du site dans un endroit sûr, soit dans les étages, s’il y en a. Outre les produits chimiques qu’il faut impérativement éloigner de la montée des eaux, sont aussi concernés tous les réservoirs et fûts contenant des déchets dangereux et dont le contact avec l’eau doit être évité à tout prix. Cela concerne enfin, tout le matériel présent dans les bureaux : les ordinateurs, les imprimantes, ou encore les archives. Il convient alors de trouver un endroit non inondable où les stocker, si possible à proximité du site, afin de ne pas se faire prendre au dépourvu, ou bien en hauteur. Lors de l’alerte, il faudra mobiliser le personnel pour le déplacement de tous ces biens produits dangereux, ou risquant d’être détruits par la montée des eaux, en lui donnant des consignes et des tâches spécifiques, afin que soit optimisée la mise en sécurité du site. La gestion préparatoire prévue en amont est donc essentielle pour garantir une protection efficace des locaux, du matériel, des personnes et de l’environnement.

Edicter des fiches réflexes définissant la procédure à suivre et répartissant les rôles semble donc être quelque chose de primordial à la bonne réalisation de tout cela. L’idéal serait de faire une fiche par problématique : une pour les archives, une pour les déchets, une pour les objets trop lourds à déplacer, une pour les objet devant être stockés hors site, etc. Il convient également de différencier les différentes phases. Les crues sont en effet des phénomènes assez lents, dans le sens où l’eau met plusieurs jours avant d’atteindre un seuil critique, même si elle monte inexorablement et sans discontinuer jusqu’à atteindre son apogée. Scinder les fiches réflexes en deux phases, une pour la phase de vigilance et une autre pour la phase d’alerte, semble alors être judicieux, afin de mieux répartir les actions à entreprendre et les étapes dans lesquelles les réaliser.

En dernier lieu vient la phase post-crue et la remise en état de l’activité. La baisse des eaux est généralement accompagnée par la découverte de l’ampleur des dégâts. Du fait de l’inondation, de nombreux déchets apparaissent : certains équipements sont détruits ou rendus inutilisables, des moisissures se créent à cause de l’humidité et des substances dangereuses se trouvent présentes dans les locaux. C’est à ce propos que la phase de prévention revêt toute son importance car, plus le matériel aura pu être sécurisé, moins de déchets seront à dénombrer, moins de temps sera utilisé pour nettoyer et plus vite repartira l’activité. La phase de nettoyage des locaux et de reprise de l’activité est ainsi le dernier élément à prendre en compte en matière de risque de crue. Elle illustre à quel point les inondations sont dévastatrices et combien il est important de le prendre en compte dans l’optique de réduction des pollutions dans la politique environnementale de l’entreprise. L’étende des actions à réaliser dépendra donc des mesures de préventions prises en amont.

Les conséquences des inondations et a fortiori des crues sont souvent minimisées car, souvent, on pense que tels dommages n’arriveront pas ou en tout cas dans un temps éloigné, mais il faut savoir qu’environ 15 000 villes en France sont concernées par les inondations. Une grande partie des entreprises présentes dans le bassin parisien sont ainsi susceptibles de subir une crue de la Seine ou d’un autre cours d’eau. Prévoir ainsi un plan de lutte interne contre les inondations est quelque chose de primordial, même si l’événement se produira dans longtemps ou jamais durant la durée de vie de l’activité sur le lieu où elle est implantée. Cela fait partie d’une logique plus générale de protéger l’environnement.



Bibliographie :

- France Nature Environnement, Les inondations et la réglementation, « L’eau au cœur des enjeux », Guide des actions associatives, septembre 2012
- GEIDE, Inondation : Prévenir, réagir, rétablir, www.geide.asso.fr
- Philippe FANARTZIS, Les entreprises face au risque d’inondation, Pour un développement robuste et durable du Grand Paris, Chambre de commerce et d’industrie de Paris, septembre 2012