
Le retour du Japon vers le nucléaire
Par Regina-Ange Chokki
Posté le: 12/08/2015 16:12
4 ans après l’accident nucléaire de la centrale de Fukushima Dai-ichi, le Japon décide de renouer avec le nucléaire. Pour rappel, l’accident avait été causé par les répercussions cumulées du séisme et du tsunami de la côte Pacifique du Tohoku. Le séisme était à l’origine de l’arrêt automatique des réacteurs et la perte d’alimentation électriques externes de la centrale. A la suite, le tsunami avait entrainé la perte totale de la source froide.
Pour saisir la gravité de l’accident, il faut se souvenir que le classement de cet accident nucléaire sur l’échelle internationale des évènements nucléaires (INES) a été réévalué à deux reprises. Les évènements ont d’abord été classés au niveau de gravité de N°4 le 12 mars 2011. Un mois plus tard le 12 avril 2011, cet accident nucléaire est considéré comme un accident majeur et classé au niveau 7 de l’INES, soit le niveau de gravité le plus élevé. Cette requalification est notamment due, au rejet massif d’eau contaminée au contact des installations nucléaires, dans l’océan.
La question de la gestion de l’eau contaminée de la centrale de Fukushima n’est pas terminée. Au contraire, il se pose déjà la question du stockage de cette eau. Vu que les capacités de stockages actuelles commencent à atteindre leur limite, il y a un risque que soit prise la décision de déverser une partie de cette eau dans la mer. En effet, le stock d’eau contaminé s’est accumulé depuis la catastrophe. Le niveau d’eau ne cesse d’augmenter car, il est nécessaire d’injecter de l’eau douce afin de mettre en œuvre le circuit de refroidissement au niveau de trois réacteurs de la centrale. Les conséquences sur la faune et la flore sont catastrophiques, dans un rayon de 20 kilomètres autour de la centrale la radioactivité est très supérieure à la limite tolérée (50 fois plus). La pêche est proscrite dans la préfecture de Fukushima.
Par ailleurs, le démantèlement du site de Fukushima est toujours en cours et devrait durer pour les quarante prochaines années. La décontamination est l’autre enjeu majeur de Fukushima et les efforts importants mis en œuvre pour permettre le retour de la population avance à petits pas.
Sachant que les conséquences de l’accident de Fukushima sont toujours visibles, avec l’accord unanime de la population, les autorités japonaises avaient pris la décision d’arrêter en 2013 toutes ses activités nucléaires. Il semblait dur alors d’envisager un retour.
Contre toute attente, le mardi 11 août 2015, le Japon a remis en fonctionnement le réacteur nucléaire de la centrale de Sendai.
Des manifestations dans le pays ont été organisées pour empêcher la remise en activité. Les 9,10 et 11 août des rassemblements se sont regroupés devant la centrale.
Les raisons de cette relance sont évidemment économiques : la centrale de Sendai en reprenant son activité, recrée de l’emploi étant donné que c’est la première entreprise de la région et les salaires rendent également son activité attractive. A ceci s’accompagne les subventions dont les municipalités disposent en contrepartie de la construction d’un réacteur.
Les efforts financiers consentis pour pallier l’apport énergétique fournit par les centrales ont eu raison du consensus national. Les compagnies d’électricités s’étaient résolues à utiliser les autres moyens de production électrique : gaz, pétrole et charbon. Mais, le coût de l’électricité a augmenté de plus de 20% depuis l’arrêt du parc nucléaire en 2013.
La crainte que suscite cette relance est la perspective du redémarrage d’autres centrales nucléaires, sur les cinquante-quatre réacteurs exploitables avant Fukushima, seuls cinq doivent être démantelés. Avec quarante huit réacteurs exploitables, les opportunités de relance de centrales nucléaires sont très intéressantes. Le redémarrage de nouvelles centrales est conditionné par l’approbation de l’Autorité de régulation du nucléaire (ARN) mais si les efforts sont fournis pour atteindre les objectifs qu’elle fixe, il n’y aura pas d’obstacles à cette reprise.
Dans l’optique de la COP 21 qui aura lieu en décembre prochain à Paris, le Japon, sixième émetteur de gaz à effet de serre, s’est fixé des objectifs de production de 20 à 22% de l’électricité par le nucléaire pour 2030 en vu de réduire ses émissions de gaz à effet de serre.
L’autre alternative qui s’offre au Japon serait de se tourner vers les énergies renouvelables. En ce sens un objectif de 24% d’énergies renouvelable a été décidé mais l’attrait des énergies fossiles moins couteuses que les dernières a orienté le choix des politiques. Toute la question réside dans le choix de privilégier les intérêts environnementaux par rapport à ceux économiques, ou non. La COP 21 aura surement pour ambition de donner des perspectives de solutions à ce dilemme.
Sources :
http://www.lefigaro.fr/international/2015/08/10/01003-20150810ARTFIG00352-attendu-par-l-economie-japonaise-le-retour-du-nucleaire-suscite-des-inquietudes.php
http://www.lemonde.fr/energies/article/2015/08/11/le-japon-lutte-toujours-contre-les-consequences-de-l-accident-de-fukushima_4720850_1653054.html
http://www.lemonde.fr/energies/article/2015/08/11/le-japon-relance-le-nucleaire-malgre-l-hostilite-de-sa-population_4720135_1653054.html
http://www.contrepoints.org/2014/04/21/163648-le-japon-dapres-fukushima-prefere-le-charbon-a-lenergie-renouvelable