Le projet de loi sur la transition énergétique pour la croissante verte a pour objectif de renforcer l'indépendance énergétique de la France, de réduire les émissions de gaz à effets de serre et de faciliter l'accès à des outils concrets pour accélérer la croissante verte.
Elle contient notamment des dispositions pour une mobilité durable.
Une nouvelle lecture du projet de loi aura lieu le jeudi 9 juillet 2015 en séance publique au Sénat.


1. La différence entre « véhicules propres » et « véhicules à faibles ou très faibles émissions »


Selon le Ministère de l’Ecologie, un véhicule propre est « un véhicule produisant peu ou pas d’émissions polluantes. Mais le caractère polluant d’un véhicule se mesure également tout au long de son cycle de vie – de sa construction à sa destruction et son recyclage. La notion de véhicule propre ne signifie donc pas totalement non-polluant. » (1)
Les véhicules propres comprennent :
- Les véhicules thermiques qui sont des véhicules équipés de moteurs à combustion interne et qui fonctionnent à base de carburants liquides ou gazeux (carburants classiques d’origine fossile – essence et gazole -, le gaz de pétrole liquéfié (GPL), le gaz naturel véhicule (GNV) et les biocarburants).
- Les véhicules hybrides qui sont des véhicules possédant deux moteurs : un moteur thermique fonctionnant avec du carburant et un moteur électrique alimenté par batterie et par restitution d’énergie cinétique ou par recharge directe sur le réseau.
- Les véhicules électriques qui fonctionnent uniquement à l’aide d’un moteur électrique, utilisant pour seule source d’énergie l’électricité accumulée dans des batteries.
Le véhicule est rechargé, via un câble et une prise de courant, sur le réseau électrique ou sur des bornes de recharges électriques, dans des lieux privés (domicile, travail) ou sur des lieux publics (parkings fermés ou en voirie, stations services, centres commerciaux, etc.). En cas de freinage ou de décélération, l’énergie cinétique du véhicule peut être convertie en électricité, ensuite récupérée par les batteries pour être stockée.
- Les véhicules à pile combustible qui sont des véhicules électriques alimentés en électricité, en tout ou partie, par une pile à combustible. Cette pile fonctionne sur la base de l’oxydation sur une électrode d’un combustible réducteur (par exemple le dihydrogène), couplée à la réduction sur l’autre électrode d’un oxydant (par exemple le dioxygène de l’air). Afin d’accélérer la réaction, le catalyseur de la membrane séparant les électrodes est en général du platine. Cependant, c’est un élément polluant et coûteux, auquel une alternative est recherchée.

Avec le second passage du projet de loi sur la transition énergétique à l’Assemblé Nationale le 21 mai 2015, on parlera, une fois la loi votée, non plus de « véhicules propres » mais de « véhicules à faibles et très faibles émissions ». (2)

Il n’existe pas encore de définition officielle de cette nouvelle notion qui sera précisée par voie de décret. Cette définition comprendra notamment des seuils d’émissions de gaz à effet de serre et de polluants atmosphériques qui permettront de déterminer les véhicules étant considérés comme « à faibles émissions » et « à très faibles émissions ».
La ministre de l’Ecologie, Ségolène Royal, a cependant précisé que les véhicules électriques seront considérés comme étant des véhicules à très faibles émissions.
La notion de véhicules à faibles émissions reste cependant encore floue. Il semblerait que cela concernerait les véhicules émettant au maximum 95g de CO2/ km, 60mg/ km de Nox et 1mg/km de particules. (3)
La valeur concernant les émissions de CO2 correspond à l’objectif d’émissions fixé par l’Union Européenne pour l’ensemble de la gamme d’un constructeur en 2020 et la valeur des Nox correspond à la valeur réglementaire d’émissions Euro 6 pour un moteur essence. Quant à la valeur correspondant aux émissions de particules, elle est bien inférieure à celle fixée par la réglementation (4.5mg/km).
Cette nouvelle définition va permettre d’élargir le champ des véhicules concernés, par rapport à la définition donnée d’un véhicule propre. En effet, le seuil maximum considéré permettrait d’intégrer à la catégorie des véhicules à faibles émissions certaines motorisations diesel et essence pour les voitures citadines mais également les véhicules hybrides. (4)

Cette nouvelle notion apparaît notamment dans la volonté de ne plus distinguer les véhicules par leur motorisation mais par leur performance environnementale, c’est-à-dire par leur niveau d’émission de CO2 et de particules (5). Mais elle a également été étudiée du fait de la crainte émanant des constructeurs automobiles, quant au fait que la dénomination « propre » risque d’être opposée au qualitatif « sale ». (6)

Cette nouvelle notion va avoir un impact sur les réglementations en cours puisque les véhicules concernés ne sont plus les mêmes.


2. La répercussion de ce changement


Les conducteurs de véhicules à très faibles émissions ou à faibles émissions se verront octroyer certaines dérogations ou avantages, se justifiant par le choix d’utilisation du véhicule.

Par exemple, les véhicules légers à très faibles émissions et les véhicules de covoiturage dont les conducteurs seront titulaires d’un abonnement bénéficieront d’un tarif réduit aux péages des autoroutes.
Une étude sera également lancée quant à la possibilité d’intégrer ces véhicules à la liste des usagers pouvant emprunter les voies privilégiées sur les autoroutes à deux fois trois voies. L’étude permettra de déterminer la faisabilité de cette action en termes d’impacts sur la congestion.

D’autres impacts vont être recensés, notamment en rapport avec les actions déjà mises en place sur le plan de la pollution atmosphérique et les procédures à mettre en place lors d’épisodes de pics de pollution.

L’arrêté du 26 mars 2014 relatif au déclenchement des procédures préfectorales en cas d’épisodes de pollution de l’air ambiant indique la procédure à suivre en cas de pics de pollution correspondant au seuil de niveau d’alerte. Cet arrêté préconise notamment la mise en place de l’interdiction pour certains véhicules de circuler. Cette interdiction touche les citoyens des villes concernées, comme par exemple cela a déjà été constaté en Ile-de-France, lors de la mise en œuvre du système de la circulation alternée qui a été choisi. (7)
Dans le cas du non-respect par les usagers de la route de la circulation alternée, des sanctions sont prévues. Toute infraction est passible d'une contravention de 2ème classe, soit une amende de 22 euros si elle est réglée immédiatement ou de 35 euros si elle est réglée plus tard. Cette amande peut être réitérée à chaque contrôle, même si le conducteur a déjà été contrôlé dans la journée. Aussi, un automobiliste récalcitrant pourra voir son véhicule immobilisé ou mis en fourrière. Des contrôles techniques et des contrôles de pollution pourront également être effectués.
Il existe cependant des dérogations à cette circulation alternée notamment pour les véhicules propres (électriques, hybrides, gaz naturel) et pour le covoiturage (minimum 3 personnes).
Le passage de « véhicules propres » à « véhicules à faibles ou très faibles émissions » pourra ainsi avoir des répercussions au niveau de ces dérogations. On peut par exemple prévoir une exemption pour ces types de véhicules à la circulation alternée.

Le changement de définition va également avoir un impact sur le plan de lutte contre la pollution atmosphérique de la ville de Paris dont les objectifs sont les suivants :
- La mise en place de zones de basses émissions avec des restrictions de circulation applicables aux véhicules les plus polluants
- Au 1er juillet 2015, une interdiction de circuler pour les poids lourds et bus.
- Au 1er juillet 2016, une interdiction de circuler pour les véhicules de classe 1 étoile (Véhicule essence ou diesel pré-euro, euro 0 ou euro 1, mis en service avant le 1er janvier 1997).
- Entre 2017 et 2020, une interdiction de circuler pour les véhicules de classes 2 (Véhicule diesel euro 2, mis en service avant le 1er janvier 2001) ,3 (Véhicule diesel euro 3, mis en service avant le 1er janvier 2006) puis 4 étoiles (Véhicule essence ou diesel euro 4, mis en service avant le 1er janvier 2011).
- La mise en place de zones à trafic limité qui pour but d’être des zones quasi-piétonnes dans l’hyper centre de Paris et dans d’autres quartiers en fonction des demandes des maires d’arrondissement. Aussi, des voies à ultras basses émissions pourraient être expérimentées en 2016, à savoir un sens de circulation réservé aux véhicules propres.
La Ministre de l’Ecologie, Ségolène Royale, a présenté un nouveau concept d’identification des véhicules selon leur classe écologique, par le biais de vignettes (8). Ce nouveau classement présente sept catégories de véhicules contre seulement cinq avec le classement actuel. Il est ainsi possible que le calendrier d’interdiction de circulation soit adapté à ces nouvelles catégories. On peut supposer que les véhicules à très basses émissions et à basses émissions vont être autorisés à circuler au vu du calendrier présenté ci-dessus et de l’objectif de différenciation qu’implique cette appellation.
On peut également considérer que les véhicules à très faibles émissions et à faibles émissions ne seront pas concernés par l’interdiction de circuler dans les zones de basses émissions.
Quant à la voie à ultras basses émissions qui concerne pour le moment les véhicules propres, elle pourrait avec la nouvelle notion, concerner les véhicules à très faibles émissions. La question des véhicules à faibles émissions ne peut pas être tranchée car on ne sait pas exactement quels véhicules entrent dans cette définition. Il est probable que les véhicules considérés comme propres soient pour certains considérés comme « à faibles émissions » et d’autres « à très faibles émissions ». Seul le décret d’application pourra nous éclairer sur ces qualitatifs et répondre ainsi aux questions des véhicules concernés par les exemptions.

La notion de véhicules « à faibles ou très faibles émissions » a donc surtout un impact en termes de champ d’application, puisque le genre de véhicules concernés est élargi par rapport à la notion de « véhicules propres ». La question qui se pose concernant les véhicules à très faibles émissions est de savoir si ce qualitatif va reprendre les véhicules étant considérés comme des « véhicules propres » ou si certains seront considérés comme étant des véhicules à faibles émissions. Reste également à savoir dans quelle mesure les véhicules à faibles émissions vont être exemptés de certaines réglementations contraignantes en matière de circulation, cette notion devant intégrer des véhicules utilisant uniquement des combustibles fossiles.

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Sources :

(1) Ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, Véhicules propres : enjeux, définitions et objectifs, publié le 2 avril 2015
Consultable sur : http://www.developpement-durable.gouv.fr/Definitions,26797.html (page consultée le 03/07/2015)

(2) Avere France, Le projet de loi sur la transition énergétique veut verdir le bus et les autoroutes, publié le 22 mai 2015
Consultable sur : http://www.avere-france.org/Site/Article/?article_id=6150 (page consultée le 03/07/2015)

(3) L’argus, Voitures à faibles émissions : Renault quasi exclu mais pas Porsche !, par Arnaud Murati, publié le 29 mai 2015
Consultable sur : http://www.largus.fr/actualite-automobile/voitures-a-faibles-emissions-roulez-en-porsche-ou-en-4x4-6273402.html (page consultée le 03/07/2015)

(4) Guillaume Darding, France : la fin des véhicules propres, par Guillaume Darding, publié le 22 mai 2015
Consultable sur : http://www.guillaumedarding.fr/france-la-fin-des-vehicules-propres-7329067.html (page consultée 03/07/2015)

(5) Comité des Constructeurs Français d’Automobiles, Le ministère de l’Ecologie préparerait une réglementation pour lutter contre les émissions de particules frein, publié le 1er juillet 2015
Consultable sur : http://www.ccfa.fr/Le-ministere-de-l-Ecologie-150031 (page consultée le 03/07/2015)

(6) Auto Plus, On ne dit plus « véhicules propres » mais …, publié le vendredi 22 mai 2015
Consultable sur : http://news.autoplus.fr/news/1493826/Gouvernement-Emissions-polluantes-Hybride-Electrique-Transition-%C3%A9nerg%C3%A9tique (page consultée le 03/07/2015)

(7) AirParif, La procédure d’information et d‘alerte en région île-de-France
Consultable sur : http://www.airparif.asso.fr/reglementation/episodes-pollution (page consultée le 03/07/2015)

(8) Actu Environnement, Pollution de l’air : Ségolène Royal lance un nouveau système d’identification des véhicules, par Laurent Radisson, publié le 2 juin 2015
Consultable sur : http://www.actu-environnement.com/ae/news/vignettes-auto-identification-segolene-royal-pollution-air-emissions-24641.php4#xtor=ES-6 (page consultée le 03/07/2015)