Le 3 mai 2001, le Président de la République Jacques Chirac a annoncé pendant son discours d'Orléans la mise en place d'un comité chargé de rédiger la charte de l'environnement. Cet engagement a été repris pendant sa campagne de 2002. La Charte a été le fruit de quatre ans de travail de la commission dite Coppens car présidée par le professeur Yves Coppens, célèbre paléontologue. L'originalité de cette commission réside dans le fait que le public a été consulté tout au long de son processus de rédaction: vétérinaires, professeurs d'université, philosophes et autres juristes ont participé aux côtés des députés, maires et secrétaires d'état à l'élaboration de cette charte. Elle a été promulguée le premier mars 2005 et a valeur constitutionnelle.
Si elle édicte plusieurs principes généraux du droit de l'environnement, ils ne sont pas tous directement invocables devant le juge. En effet, la décision du Conseil d'Etat du 3 octobre 2008 dite << Commune d'Annecy >> a invalidé un décret relatif à la participation du public qui, selon l'article 7 de la charte de l'environnement, doit être définie par la loi.
L'article 7 dispose que << Toute personne a le droit, dans les conditions et les limites définies par la loi, d'accéder aux informations relatives à l'environnement détenues par les autorités publiques et de participer à l'élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l'environnement>>.
Il a donc fallu que le pouvoir législatif créer une loi pour que le citoyen puisse jouir de son pouvoir d'accès à l'information.
Une loi relative à ce principe a donc été promulguée le 27 décembre 2012, et donne le droit au public de participer et d'obtenir les informations sur toutes les décisions prises en matière d'environnement.
Cet article vise à étudier dans un premier temps les avancées conférées par cette loi (I) avant de mettre en lumière les pistes d'améliorations possibles au travers du rapport sur le dialogue environnemental remis par la commission spéciale sur le dialogue environnemental à Ségolène Royale, le 3 juin 2015 (II).

I. La mise en Å“uvre actuelle du principe de participation du public

Si la loi de 2012 a été considérée comme une avancée pour le dialogue environnementale (A), elle nécessitait aussi quelques ajustements (B).

A. La loi du 27 décembre 2012: une avancée pour la démocratie environnementale

Sabine Buis, rapporteur de la commission paritaire, a précisé que ce projet de loi était un texte technique qui avait pour unique vocation de répondre à la censure du Conseil d'Etat et du Conseil Constitutionnel sur les décrets mis en œuvre par le gouvernement pour appliquer l'article 7 de la Charte. Cependant, au fil des travaux de la commission, le texte a évolué et a apporté bien plus qu'il n'était censé à l'origine.

Cette loi du 27 décembre 2012 a procédé à une réécriture de l'article L120-1 du code de l'environnement. Cet article organise la participation du public lorsqu'il n'y a pas de procédures spéciales (comme les enquêtes publiques par exemple).
Celui-ci offrait auparavant la possibilité pour le public de participer à la préparation des décisions ayant un impact sur l'environnement (construction d'un ouvrage, projet de loi concernant l'environnement etc..). Cette procédure a donc été élargie et désormais, c'est l'ensemble des décisions publiques de l'Etat et de ses établissements publiques qui a été intégré au champ d'application.

Une nouveauté non négligeable a aussi été instaurée par la loi : lé délivrance des permis miniers fait désormais l'objet de la procédure de participation. L'Etat n'était pas favorable à cette mesure, en ce sens où les principaux intéressés appréhendaient retards dues à une réticence du public vis-à-vis de ces projets.

B. L'ordonnance du 5 aout 2013: un outil de correction de la loi

L'ordonnance de 2013 a réécrit l'article L120-1 du code de l'environnement. La procédure de participation du publique a été élargie aux autorités administratives indépendantes, ainsi qu'aux collectivités territoriales. Mais cette extension ne concerne pas les décisions individuelles propres à l'Etat.

L'ordonnance a aussi permis d'adapter les modalités de mise en œuvre en fonction de la taille des communes.
La procédure choisie privilégie la participation par voie électronique, cependant, face aux difficultés d'accès à internet, qu'ils soient d'ordre matériels ou générationnels, la loi prévoie un autre système pour les communes de moins de 10.000 habitants et les groupements de collectivités de moins de 30.000 habitants. Pour ces catégories, un registre en mairie sera utilisé pour obtenir les observations sur papier pour ceux qui le souhaitent. Les informations relatives au projet et à l'objet de la procédure de participation feront aussi l'objet d'un affichage en mairie. Pour les communes de moins de 2000 habitants, c'est une réunion publique qui est privilégiée afin de recueillir les différentes observations des citoyens.
Le public doit aussi être prévenu trois mois à l'avance des textes qui font l'objet de cette consultation, qui doit durer au minimum 21 jours.
Enfin, l'ordonnance a permis d'exclure certaines décisions de l'application de l'article L120-1.
Les décisions individuelles, comme les décisions prises au regard d'une décision règlementaire, les mises en demeure, sanctions etc.ne sont pas soumises à la procédure de participation du public.
Aussi, l'ordonnance a affiné les critères de décisions, en précisant que seules les décisions ayant un impact direct et significatif pouvaient faire l'objet de cette procédure.

II. Le rapport sur le dialogue environnemental: un projet pour la forme ?

Le projet de barrage Sivens a fait l'objet d'une forte contestation de la part du public. Suite à l'évacuation de contestataires par les autorités et à l'impact médiatique que celui-ci a engendré, la ministre de l'écologie a mis en place une commission pour améliorer le dialogue autour des aménagements. Il conviendra d'étudier les mesures proposées (A), avant de mettre en lumière ses limites (B).

A. Les mesures proposées par le rapport " Débattre et Décider "

Ce rapport fait suite à l'engagement du Président de la République en novembre 2014 lors de la conférence environnementale d'améliorer le dialogue environnemental.

Ce projet a été qualifié d'innovant par Ségolène Royale, en ce sens où il propose d'instaurer de nouveaux principes dans le Code de l'environnement.

La commission propose d'organiser la participation du public en amont du projet, c’est-à-dire au stade de l'avant-projet. Cette nouveauté s'appliquerait aux projets ayant les plus grands impacts sur l'environnement, c’est-à-dire ceux qui se mettent en place sur plusieurs années, pour que la phase avant-projet/projet puisse faire clairement l'objet d'une distinction. Pour cela, la commission distingue deux catégories de projets qui pourraient faire l'objet de la procédure de participation en amont: les plans et programmes, et les grands projets soumis à l'autorisation de la Commission Nationale du Débat Public.
La commission propose aussi de créer une obligation de déclaration d'annonce de projet, afin que le public puisse jouir de son droit d'accès à l'information et de participation à un stade utile, c’est-à-dire à un stade où toutes les grandes décisions du projet n'ont pas encore été prises.
Une obligation de rendre compte aux observations du public est aussi une solution envisagée par les rédacteurs du rapport pour offrir une plus grande crédibilité à cette procédure, mais aussi pour offrir des garanties au public que ses observations ont été prises en compte.
Aussi, l'appel au vote des citoyens, qui est une prérogative des collectivités territoriales, est trop rarement utilisée et doit faire l'objet d'une remise en question.

B. Un rapport limité

Certains acteurs de l'environnement, comme le président de France Nature Environnement, a estimé que le rapport ne répondait pas aux enjeux. Il dénonce le manque de "moyens de terrain". Selon lui, il faut accorder plus d'importance aux acteurs du terrain, qui sont plus à même de juger des impacts de certains aménagements sur l'environnement.

Aussi, le referendum consultatif fait débat: en effet, il est peu probable, même en la présence d'informations suffisantes dans une zone limitée, que les habitants fassent preuve d'objectivité concernant un projet qui touche à leur commune. Aussi, certains citoyens ne disposent pas des qualifications nécessaires pour évaluer l'impact d'un ouvrage sur l'environnement.

Bibliographie:

(1) Martine Valo,<>, Le Monde
http://www.lemonde.fr/planete/article/2015/06/03/grands-projets-apres-le-drame-de-sivens-un-rapport-dessine-les-contours-de-la-democratie-environnementale_4646748_3244.html#ABJIyzGgssyzipFq.99

(2) Céline Lherminier, Mise en œuvre du principe de participation du public, Seban Associés,
http://www.seban-associes.avocat.fr/fichiers/pub_participationdupublicgazette.pdf

(3) Rapport Richard << Démocratie environnementale: Débattre et Décider>>,
http://www.developpement-durable.gouv.fr/IMG/pdf/Rapport_Richard_3062015.pdf