La « légionelle » (Legionella) est une bactérie qui se développe préférentiellement dans les eaux stagnantes et les milieux humides, tels que les réseaux d’eau chaude, les systèmes de climatisation, les tours aéroréfrigérantes...). Elle se transmet à l’homme par inhalation de microgouttelettes d'eau contaminée. Cette contamination peut engendrer des infections respiratoires qui peuvent prendre plusieurs formes : la fièvre de Pontiac (forme bénigne) et la maladie du légionnaire ou légionellose (forme la plus grave).

La légionellose est infection pulmonaire connue depuis 1976. Il s'agit d'une maladie à déclaration obligatoire en France depuis le décret n° 87-1012 du 11 décembre 1987. Cette infection peut conduire au décès chez certaines personnes, notamment chez les plus fragiles. Bien que des traitements antibiotiques soient disponibles, le taux de mortalité, compris entre 5 et 20%, reste élevé (1). Pour limiter ce risque, la règlementation en la matière se fait de plus en plus stricte et la surveillance s'intensifie grâce à la mise en place de la norme NF T90-431.

I - La norme NF T90-431

A) La surveillance en matière de légionelles

L’incidence de la légionellose a diminué en France depuis 2006 pour se stabiliser aux alentours de 1200 cas déclarés par an, grâce notamment à une meilleure identification des sources potentielles de contamination. Cette amélioration est la conséquence d'une meilleure maîtrise de la surveillance environnementale des légionelles, qui est elle-même encadrée par la réglementation (2). Les articles L. 1321-4 et L. 1322-2 du code de la santé publique fixent une obligation de surveillance et de contrôle de la qualité des Eaux Destinées à la Consommation Humaine (EDCH) et des eaux minérales naturelles. Concernant l'indicateur "légionelles", l'arrêté du 1er février 2010 dispose que la surveillance des analyses dans les réseaux d’eaux doivent être réalisées par des laboratoires accrédités, selon la norme NF T90-431 « Qualité de l'eau - Recherche et dénombrement de Legionella spp. et de Legionella pneumophila - Méthode par ensemencement direct et après concentration par filtration sur membrane ou centrifugation ». Cette méthode par culture est celle de référence pour le contrôle sanitaire des EDCH, comme précisé dans l’arrêté du 17 septembre 2003 (3).

B) Le principe de la norme

La norme NF T90-431 a été mise à jour par l’Agence française de normalisation (AFNOR) en novembre 2014. Elle remplace la version de septembre 2003, amendée en 2006 (3). Cette mise à jour est mise en application depuis avril 2015. Elle permet de rechercher et de dénombrer les bactéries Legionella specie et Legionella pneumophilla par une méthode de culture. Le résultat est exprimé en Unités Formant Colonie (UFC/L). En appliquant cette norme, chaque laboratoire s'assure de la fiabilité de sa méthode d'analyse et donc de ses résultats (4). Le lundi 11 mai 2015, le ministère des Affaires sociales a publié une note d'information à l'attention des Agences Régionales de Santé (ARS). Ce document expose les modifications apportées à la norme ainsi que les conséquences de cette révision, notamment l'adaptation dont les laboratoires devront faire preuve.

II - Les évolutions de la norme

A) Les évolutions pré-analytiques

La norme NF T90-431 distingue les eaux dites "propres" des eaux dites "sales". Les eaux propres sont définies comme les eaux chaudes sanitaires, destinées à la consommation humaine, les eaux thermales, les eaux souterraines, les eaux de piscine et assimilées (spa). Les eaux sales correspondent aux eaux industrielles, aux eaux de surface, aux eaux naturelles et aux eaux des tours aéroréfrigérantes (TAR). Les principales modifications apportées à la norme concernent les eaux "propres, notamment le cas des manipulations avec une simplification du protocole de mise en culture des échantillons. La norme autorise désormais un ensemencement direct des milieux de culture après concentration par filtration sur membrane. Auparavant grattées, les membranes sont désormais directement déposées sur le milieu de culture. Concernant les évolutions pré-analytiques l'ultime évolution porte sur le volume d'échantillon minimal autorisé. Il y a une diminution du volume, on passe de 1L à 500 mL (3).

B) Les évolutions post-analytiques

L’article 4 de l'Arrêté du 1er février 2010 précise les conditions d'expertise liées à la détection de légionelles : « Dans les établissements de santé, les dénombrements en Legionella pneumophila doivent être inférieurs au seuil de détection, au niveau de tous les points d'usage à risque accessibles à des patients identifiés par le comité de lutte contre les infections nosocomiales ou toute organisation chargée des mêmes attributions comme particulièrement vulnérables au risque de légionellose. Lorsque ces seuils ne sont pas respectés, le responsable des installations prend sans délai les mesures correctives nécessaires au rétablissement de la qualité de l'eau et à la protection des usagers. »

La principale modification de la norme concerne la détection et la quantification des légionelles. Dans la version de 2003 de la norme, le seuil de détection était de 50 UFC/L et le seuil de quantification était de 250 UFC/L. La nouvelle version de la norme de 2014 abaisse les seuils de détection et de quantification. Ces deux seuils sont désormais confondus à 10 UFC/L, pour les eaux propres. Pour les eaux des TAR, le seuil de quantification est abaissé de 500 UFC/L à 100 UFC/L En conséquence, toute détection de légionelles est désormais quantifiable (3). Suite à l'abaissement de ce seuil, il est fort probable que les établissements concernés soient obligés de modifier leur procédure d’intervention et que les actions curatives soient plus fréquentes.

Au sein de la note d'information, le ministère des Affaires sociales précise que "l'ensemble des impacts liés à cette modification normative n'est pas précisément connu à ce jour". Malgré cela, sont mentionnées dans la note les principales conséquences envisagées pour les différents acteurs (5). Par exemple, l'ARS doit veiller à la bonne interprétation des résultats en fonction des nouveaux seuils applicables. Elles sont d'ailleurs invité à fournir un retour d'expérience relatif à l'application de cette norme, au cours de l'année 2016.

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Sources:

(1) Ministère des affaires sociales, de la santé et des Droits des femmes - Légionellose - Publié le 16 septembre 2014. Disponible sur : http://www.sante.gouv.fr/legionellose.html (Page consultée le 19 mai 2015)

(2) Anses - Agence Nationale de Sécurité sanitaire, alimentaire, environnementale et de travail - Méthodes de détection et de dénombrement des Legionella dans l'eau - Avis de l'Anses et rapport d'expertise . Février 2011. 159 p. Disponible sur : http://nosobase.chu-lyon.fr/recommandations/anses/2011_Legionella_anses.pdf (Page consultée le 16 mai 2015)

(3) Note d'information - N° DGS/EA4/2015/118 du 13 avril 2015 relative aux conséquences de la modification de la norme NF T90-431 "Qualité de l'eau - Recherche et dénombrement de Legionella spp. et de Legionella pneumophila - Méthode par ensemencement direct et après concentration par filtration sur membrane ou centrifugation" (révision 2014)

(4) Sophie JARRAUD et Jean FRENEY. Legionella. 2ème éd. Paris : Lavoisier, 2012, 276 p (Monographie de microbiologie collection dirigée par Jean-Paul LARPENT)

(5) Actu Environnement - "Risque légionelles : une nouvelle méthode d'analyse" publié le 13 mai 2015 par Anne-Sophie LUCHEZ.
Disponible sur : http://www.actu-environnement.com/ae/news/circulaire-ministere-affaires-sociales-risque-legionnelles-nouvelle-methode-analyse-24511.php4 (Page consultée le 16 mai 2015)