Le 29 avril dernier, le Ministère de l'Ecologie du Développement durable et de l'Energie a oublié le 2ème Plan National d'Action pour l'Achat Public Durable (PNAAPD). Suite à la directive Marchés publics de 2004, un premier PNAAAPD avait été élaboré et publié en 2007 mais n'a pas connu la publicité qu'il méritait. Ce plan national avait pour finalité principale de favoriser l'émergence et le développement de modes de conception, de production et de consommation durables. Les objectifs fixés n'ayant pas été atteints, un nouveau plan national d'action 2015-2020 a vu le jour. Ce nouveau plan fixe des objectifs stratégiques permettant de contrer "les obstacles qui ralentissent la montée en puissance de l'achat public durable" et énumère les travaux prioritaires à mener. Parmi ceux-ci, le plan préconise d'étendre aux sous-traitants les exigences contractuelles en matière sociale et environnementale imposées au titulaire du marché.

Les clauses environnementales et sociales insérées dans le marché public sont-elles imposables aux sous-traitants auxquels fait appel le titulaire du marché?

La réponse est négative. Rappelons que le contrat de sous-traitance est un contrat de droit privé conclu entre le titulaire du marché et le sous-traitant. Par conséquent, ce contrat détermine la relation contractuelle entre le titulaire du marché et le sous-traitant qui ne se voit pas opposer les clauses prévues par l'attributaire dans le marché public. Ceci étant, l'attributaire du marché dispose d'un droit de contrôle quant à la conclusion de tels contrats et pour cause, lorsque le titulaire du marché souhaite faire appel à des sous traitants, il doit, soit en informer l'attributaire lors de la conclusion du contrat soit l'en informer pendant l'exécution du contrat. Dans les deux cas, l'attributaire doit donner son accord. Pour cela, il se base principalement sur les compétences professionnelles et financières du sous-traitant. L'agrément n'est donc pas conditionné à la considération des clauses environnementales et sociales par le sous-traitant . Il serait donc judicieux d'intégrer un contrôle du respect des normes environnementales et sociales avant d'octroyer l'agrément. Actuellement, aucun texte législatif ne le prévoit.

Les clauses environnementales et sociales insérées dans le marché public peuvent-elles être imposées aux sous-traitants auxquels fait appel le titulaire du marché?

Ma réponse est positive. Le titulaire du marché est en mesure d'imposer le respect des normes environnementales et sociales. Il peut le faire soit dans le cadre de la mise en place d'un système de management prévu par les normes ISO 14001 et OHSAS 18001 qui impliquent d'étendre le champs d'application des exigences sociales et environnementales aux activités sous-traitées (1). En sus, il peut le faire via l'élaboration d'une charte de sous-traitance dans laquelle il formule des exigences environnementales et sociales applicables à l'ensemble de ses sous-traitants(2).

1. La considération des clauses sociales et environnementales par le sous-traitant est un pré-requis exigé par le titulaire du marché si ce dernier respecte les dispositions de normes telles que ISO 14001 ou OHSAS 18001 ou encore ISO 26000.

L'attributaire du marché peut insérer des clauses sociales et environnementales dans le marché public en s'appuyant sur des spécifications techniques existantes telles que les normes ISO 14001, OHSAS 18001, ISO 26000, etc. Néanmoins, précisons que l'offre du candidat ne pourra pas être rejetée au motif qu'elle n'est pas conforme à une norme si le candidat prouve que les solutions qu'il propose respectent de manière équivalente les spécifications de la norme. En tout état de cause, le respect de ces normes peuvent créer un phénomène d'entrainement dans le secteur privé. Pour exemple, en vertu de la norme ISO 14001, l'entreprise doit analyser et maîtriser les impacts environnementaux issus directement ou indirectement de l'activité de l'entreprise. Par "indirectement", il faut comprendre que la société est tenue de maîtriser les impacts générés par les activités sous-traitées ce qui la conduira à sélectionner les sous-traitants en fonction de critères environnementaux spécifiques.

2. La considération des clauses sociales et environnementales par le sous traitant peut être imposée aux sous-traitants via la charte de sous-traitance élaboré par le titulaire du marché.

De nombreuses sociétés optent pour une attitude positive en faveur de la protection de l'environnement et du développement durable. Cette attitude se caractérise par une politique volontaire de maîtrise de la sous-traitance qui va se traduire soit par l'élaboration d'une charte d'achat responsable à l'égard des prestataires et fournisseurs, soit par l'élaboration d'un accord de sous traitance qui permet d'avoir une meilleure connaissance et un meilleur contrôle des conditions de sous-traitance au plus près du terrain, soit encore par l'insertion dans le cahier des charges des sous-traitants, d'exigences sociales et environnementales telles qu'édictées dans le cadre d'un marché public: en somme, le titulaire du marché n'est pas démuni de tout outil juridique lui permettant de rendre sa politique environnementale et sociale pleinement efficace et à toute échelle.

Pour conclure, l'insertion de clauses environnementales et sociales dans les marchés publics peut avoir des conséquences positives dans le secteur privé à condition que les titulaires de marché favorisent la diffusion des exigences sociales et environnementales du marché public à l'ensemble de ses sous-traitants. Telle est la finalité du PNAAPD 2015-2020: étendre la considération des clauses sociales et environnementales à toute les étapes du processus d'achat.