La pollution de l’air par l’aviation civile

Il y a quelques jours le PDG de Qatar Airways a fait une sortie très remarquée. Sa compagnie est accusée par les compagnies américaines de bénéficier de subventions d'Etat. Akbar al-Baker a répliqué en déclarant que l'Américaine Delta Air Lines faisait voler des avions "pourris qui ont 35 ans" et mettre en avant le fait que d’une part Qatar Airways dispose d'une "flotte ultra-moderne" et d’autre part est la compagnie aérienne qui émet le moins de CO2.

Le fait est que le transport aérien pollue. L’avion émet entre 134 et 148 grammes de CO2 par voyageur/kilomètre (contre 2,6 grammes pour le train). Or pour chaque kilo de kérosène utilisé, ce sont 3 kilos de C02 qui sont émis.

En Île-de-France, l’association Airparif estime que les rejets des avions au sol et à basse altitude représentent 5 % des NOx et 2 % des HC émis dans la région. Mais ces données sont incertaines et l’Onera cherche à les affiner.

De plus, le transport aérien n'émet pas que du CO2 : les oxyde d'azote (NOx) émis par les avions réagissent rapidement et ont un impact sur l'effet de serre à la fois réchauffant par la formation d'ozone troposphérique (O3) et refroidissant par la dégradation du méthane (CH4).

Les moteurs d’avion émettent principalement les composants polluants suivants :
• oxydes d’azote (NOx),
• monoxyde de carbone (CO),
• hydrocarbures (HC) (ou composés organiques volatiles : COV),
• dioxyde de soufre (SO2)
• et particules solides ( SUIES).

On peut estimer aujourd'hui que l'impact réel de l'aviation sur le réchauffement climatique semble être de l'ordre de 4 à 8 %. Par ailleurs il faut souligner que le trafic aérien croit beaucoup plus vite que d’autres activités participant ainsi à l'effet de serre (cependant il faut rappeler la rotation importante dans les flottes des compagnies : les avions sont remplacés par d’autres moins gourmands en essence et donc plus écologiques).

Si la contribution de l'aviation à la production du principal gaz à effet de serre CO2 reste modérée (de l'ordre de 12% de la pollution totale attribuée au secteur des transports), l'inéluctable croissance annoncée du trafic change néanmoins la donne.

Certaines pratiques sont plus polluantes que le simple vol. Celle qui peut-être quasiment assimilée à de l’épandage de carburant : il s’agit du délestage.

Le délestage

Les délestages de carburant par des avions sont des opérations exceptionnelles dictées par des exigences de sécurité. En effet la masse maximale autorisée des avions à l'atterrissage est inférieure à leur masse maximale au décollage. Ainsi, lorsqu'un pilote est dans l'obligation, pour des motifs techniques, soit d'effectuer un atterrissage imprévu, soit de se reposer immédiatement après son décollage, il doit alléger son appareil jusqu'à atteindre sa masse maximale autorisée à l'atterrissage.

Le carburant embarqué étant le seul lest possible, il peut effectivement être largué dès lors qu'il n'est pas possible, pour des raisons de sécurité, d'atteindre le même résultat par une attente en vol. En ces circonstances, les services en charge de la circulation aérienne orientent les avions vers des zones non urbanisées éloignées de 75 à 80 kilomètres de Paris. Il est ensuite exigé du pilote qu'il ne débute le largage de carburant que sous certaines conditions. Ces dernières vont permettre au kérosène de se vaporiser ; seule une très faible quantité parvient au sol. Ces opérations sont heureusement très rares.

Les moteurs et les apu sont les principales sources de pollution

Les sources des pollutions : il y a évidement les moteurs mais aussi les APU. Les APU sont des moteurs auxiliaires de puissance, situés en général à l’arrière de l’avion, dans le cône de queue. Ils fonctionnent avec du kérosène provenant des réservoirs de l’avion et sont utilisés pour alimenter l’avion en énergie électrique, en air conditionné, ainsi que pour démarrer les moteurs. Bien que la quasi-totalité des avions à réaction soient équipés d’un APU, certains turbopropulseurs et certains avions d’affaires n’en disposent pas.

Les solutions

Deux leviers économiques peuvent freiner l'envolée des émissions du trafic aérien : la hausse des prix du pétrole et l'introduction d'une taxe ou d’une législation plus contraignante en matière de pollution de l’air concernant le transport aérien.

Cependant d’un point de vue juridique la limitation des émissions de gaz par les compagnies aériennes ne peut que se développer. En effet il faut remarquer que la législation dans ce domaine est quasi inexistante.

On peut rappeler qu’en avril 2014 les députés européens ont décidé de limiter l'application de l’ETS ( l’European Trading Sheme le système de quotas CO2) aux seuls vols intra-européens jusqu'en 2017, exonérant tous des vols long-courriers. L’Organisation de l'aviation civile internationale (OACI) s’est engagée à mettre en place un système de droit à polluer afin de réduire les gaz.

Tout en précisant que "les États doivent s'entendre" pour soumettre en 2016, une proposition "susceptible" d'être mise en œuvre d'ici 2020. Au regard de la situation concurrentielle et de la force des compagnies du Golfe il n’est pas certain qu’un compromis aboutisse.

La technologie comme salut ?

La technologie semble être la voie la plus privilégiée dans la réduction aux émissions de gaz et composés dangereux pour la sant2 comme pour l’environnement.

La plate-forme technologique dite Efficient and Environmentally Friendly Aircraft Engine (EEFAE) est un programme doté d’un budget total de 100 millions d'euros visant à relever le défi de la réduction des émissions. Son objectif est de valider et d’intégrer dans la conception et le développement des moteurs, un faisceau de technologies innovantes de réduction des émissions qui ont déjà été étudiées et développées dans le cadre de recherches européennes ou nationales.

Regroupant quinze partenaires industriels, trois centres de recherche, deux universités ainsi qu'un certain nombre de PME dans dix pays, EEFAE s'articule en deux volets concrets. "Ces deux volets ont des horizons différents. L'un, Affordable Near Term Low Emissions Engine (ANTLE), emmené par Rolls-Royce, vise à introduire les meilleures technologies disponibles pour la réduction des émissions polluantes dans les générations actuelles de moteurs, précise Reiner Dunker.

L'autre, conduit par les motoristes SNECMA et MTU, a pour objectif de développer un nouveau cycle moteur comprenant des échangeurs de chaleur, en vue d'une réduction radicale des émissions de CO2 et Nox."

Un autre programme est aussi lancé : Clean Sky ("ciel propre"), lancé en février 2008 par le Conseil consultatif européen ACARE, a d’ailleurs fixé des objectifs ambitieux à l’horizon 2020 : moitié moins de rejets de CO2, 80 % d’oxydes d’azote en moins (NOx), un bruit lui aussi diminué de moitié , le tout avec une conception écologique du cycle de vie des produits (fabrication, maintenance, recyclage).

Sources
http://www.developpement-durable.gouv.fr/IMG/pdf/Guide_CITEPA__APU_180707.pdf
http://www.developpement-durable.gouv.fr/IMG/pdf/Guide_CITEPA_2013.pdf
Réponse du ministère : Équipement publiée dans le JO Sénat du 30/03/2000 - page 1150