I- L’apparition d’intrusions illégales perpétrées par des drones


Le 5 février 2015 les députés ont voté la proposition de loi de l’UMP renforçant les sanctions en cas d’intrusion illégale sur site nucléaire. Cette loi prévoit un délit pénal spécifique prévoyant jusqu’à 7 ans d’emprisonnement et 100 000 euros d’amende. Ce texte devra encore passer devant le Sénat et demande au gouvernement de remettre au Parlement avant le 30 Septembre 2015, un rapport évaluant « les risques et menaces que constituent les survols illégaux par des aéronefs télé pilotés ».

Effectivement, depuis le 14 septembre, des drones ont survolé 31 centrales nucléaires et se sont rendus coupables de violation de l’espace aérien sur 14 sites. Cette menace a entrainé en Décembre 2014 la décision de le Défense d’envoyer un hélicoptère de type Gazelle afin d’intercepter une de ces machines aux abords de la centrales Golfech (Tarn-et-Garonne). Bien que Jean-Yves Le Défaut, président de l’Office Parlementaire d’Evaluation des Choix Scientifiques et Technologiques (OPECST), considère que ces survols ne sont que très peu susceptible de réaliser une attaque terroriste, ils suscitent l’inquiétude des citoyens et rend crucial la mise en place de moyens de défense afin de limiter, voire d’éradiquer, ces intrusions.


II- Comment évaluer le niveau du risque sur la sécurité des sites nucléaire


Tout d’abord, la nouveauté de ces technologies et leur coût très abordable pour le grand public entrainent, par effet de mode, une multiplication soudaine de leur utilisation par des personnes pas ou peu au fait de la réglementation qui la cadre. Ainsi parmi le nombre de plus en plus élevé des infractions relevées sans interpellation de leurs auteurs, il est difficile d’estimer un réel impact sécuritaire : comment en effet différencier l’activité de loisir de l’utilisation malfaisante ?

Ensuite, quel poids apporter à l’existence réelle d’un tel danger ? Un rapport confidentiel a été rédigé par le cabinet britannique Large and Associates, pour le compte de l’organisation de défense de l’environnement Greenpeace, analysant l’ampleur de ce risque a été remis au cabinet du Premier Ministre, au Ministère de l’Intérieur, ainsi qu’au Ministère de l’Ecologie. Ce document transmis au journal L’Express n’a jamais été rendu public pour éviter une « paranoïa sécuritaire » dans la mesure où celui-ci liste les risques potentiels qu’entraineraient ces survols de sites nucléaires. Le rapport énonce plusieurs scénarios d’attaques, tels que l’enregistrement de trajectoires préparant l’envoi de drones armés, ce risque étant toutefois nuancé par la taille des drones capables d’embarquer des armes de destruction significative les rendant facilement détectables, ou tels que le sectionnement de câbles de manutention des conteneurs de combustibles usagés lors de leur déplacement, ou la destruction de l’alimentation électrique du site.

Il faut souligner que la communauté scientifique considère aujourd’hui que la capacité de cette technologie à causer des dommages est surévaluée. En revanche, une évolution rapide de celle-ci est à prévoir, donc des menaces qui aujourd’hui ne pourraient pas, ou difficilement, être mises en place, pourraient l’être dans un laps de temps court.

Cela met en exergue l’importance cruciale de mettre en place une règlementation plus précise et efficace, prévoyant en particulier l’application de sanctions lourdes et dissuasives, à l’égard des auteurs de survol de sites sensibles par des aéronefs télé pilotés susceptible de causer des dommages significatifs et des atteintes à la sécurités des installations nucléaires.


III- La règlementation en vigueur appliquées aux drones civils.


La DGAC française a été l’une des premières à mettre en place à partir de 2012 une règlementation afin d’accompagner l’essor de cette nouvelle technologie sans en brider le développement par des limitations trop strictes. Deux arrêtés, datés du 11 avril 2012, l’un relatif aux conditions d’insertion dans l’espace aérien, et l’autre relatif à la conception des appareils, définissent l’utilisation des aéronefs télé pilotés et les capacités requises pour les télépilotes : une hauteur en vol limitée à 150m, en dehors des agglomérations, des zones proches des aérodromes et en dehors des espaces aériens spécifiquement règlementés qui figurent sur les cartes aéronautiques. Il est en outre bien a précisé que le télépilote est responsable de tout dommage causé par son aéronef ou par des objets qui s’en détachent aux personnes, aux biens et aux surfaces conformément à l’article L6163-2 du Code des transports. Si l’évolution du drone est en violation des règles de sécurité, le télépilote encours jusqu’à un an d’emprisonnement et 75000 d’amende conformément à l’article L6232-4 du Code des transports.

En ce qui concerne, la potentielle violation de la protection de la vie privée en cas d’utilisation de drones équipées d’un appareil photo, d’un caméra mobile, d’un capteur sonore, ou même de dispositifs de géolocalisations, le code pénal prévoit en son article L226-1 jusqu’à un an d’emprisonnement et 45000 euros d’amende le fait volontaire de porter atteinte à la vie privée d’autrui.
Il apparait donc qu’aujourd’hui que rien n’est prévu pour protéger spécifiquement les survols et les prises de vues de centrales nucléaires alors que celles-ci portent en elles une sensibilité et une confidentialité très élevées. C’est la raison pour laquelle la création d’une loi nouvelle doit apporter des sanctions spécifiques à ce type de violation.


IV- Une règlementation pénalisante demandée pour 2015


L’entrée illégale des manifestants de Greenpeace au sein du site de Tricastin le 15 juillet 2015 a mis en avant la nécessité d’apporter sans tarder une protection plus accrue des sites nucléaires.
Les textes en vigueur prévoit des sanctions pénales graduées allant d’un an d'emprisonnement et 15000 euros d'amende pour une « simple » intrusion, à trois ans de prison et 45 000 euros d'amende lorsque cette infraction est commise en réunion, ou qu'elle est assortie d'un « acte de destruction, dégradation ou détérioration », jusqu’à sept ans d'emprisonnement et 100 000 euros d'amende si l'intrusion est commise avec usage ou menace d'une arme, ou encore en bande organisée.
L’ampleur des réactions face aux survols récents des sites nucléaires a clairement mis en lumière le besoin d’un texte prenant en compte le risque engendré par l’utilisation de drones à des fins malfaisantes. En préalable à son écriture, les autorités gouvernementales ont demandé la un rapport interministériel évaluant ce risque avant le 30 septembre 2015, afin que soit définies des solutions envisageables afin d’améliorer la détection et la neutralisation de cette menace.

A titre d’ exemple, on peut noter que la Chine, consciente de cette menace, a développé un système laser capable de pulvériser dans un rayon d’un kilomètre un petit engin aérien moins de 5 secondes après avoir été repéré. L’étude de ce type de moyens de neutralisation radicale qui aurait pu paraitre excessive il y a encore quelques mois, pourrait faire partie des solutions préconisées aujourd’hui.