Face aux préoccupations actuelles de développement durable, les fonctionnements linéaires sont remis en cause en faveur de la promotion de systèmes plus respectueux des mécanismes cycliques des éco-systèmes. Et les réseaux d'assainissement n'échapperont désormais pas à ce phénomène. En effet, un projet d'étude a été récemment lancé afin de trouver un assainissement plus durable et de palier aux dérives environnementales du système actuel. En effet, l'organisation depuis 150 ans, qui consiste au « tout à l'égout » connaît ses limites : non seulement elle utilise un nombre d'énergie considérable afin de détruire des ressources en voie de disparition tels que l'azote et le phosphore, qui pourraient être utilisés pour fertiliser les sols, mais elle reverse dans les cours d'eau ces éléments en des quantités qui excèdent ce qu'ils peuvent supporter. On estime que les stations d'épurations ne sauront plus que faire de la quantité d'azote qu'ils doivent traiter d'ici 2030. (1)

Ainsi, l'idée d'une optimisation des cycles carbone, azote et phosphore (projet d'étude O.C.A.P.I) (2) se fait jour, et sa concrétisation pourrait passer par la collecte sélective des urines dans les milieux urbains à forte densité. L'idée serait de séparer les urines et les excrétas à la source du réseau classique d'assainissement afin d'y récupérer les éléments et les recycler. L'azote contenue dans les urines est nécessaire aux végétaux et pourrait être utilisée comme engrais et se substituer à la production industrielle des engrais. De même, le phosphore qui est une ressource non renouvelable et de plus en plus rare se trouve dans les urines et pourrait être réutilisé comme fertilisant.
Le développement de cette technique alternative contribue au développement durable en permettant la protection des milieux aquatiques en évitant le rejet de l'azote et du phosphore responsables des phénomènes d'eutrophisation dans les cours d'eau par les stations d'assainissement. Il permettrait aussi la diminution de la fabrication et de l'utilisation d'engrais industriels puisque l'azote et le phosphore n'auraient plus besoin d'être créés artificiellement si on les réutilises là où ils existent déjà. Encore, cette technique contribuerait à la réduction et la valorisation de l'utilisation de ressources non renouvelables comme l'azote et le phosphore ou les énergies fossiles.

Si de grands projets de collecte ont déjà été mis en place dans certains pays comme la Suède ou la Suisse, la France commence à s'intéresser à l'étude. L'installation des infrastructures permettant ce tri sélectif est problématique dans les bâtiments urbains déjà existants. En effet, la collecte sélective nécessite par exemple l'installation de toilettes à séparation à la source, mais aussi des citernes récupérant et stockant l'urine dans les bâtiments. Ainsi, la mise en place de la collecte sélective a été envisagée pour les futurs logements à construire en milieu urbain, par exemple dans le cadre du Grand Paris sur 50 000 logements construits par an sur le territoire du SIAAP, mais le manque d'éducation de la population sur leur système d'assainissement ainsi que le manque d'analyse juridique actuel ralentissent la faisabilité du projet. Encore, la recherche en est à ses débuts et bien que le système d'assainissement par une collecte sélective de l'azote, du phosphore et du carbone paraissent plus respectueux de l'environnement mais certaines questions se posent encore.
L'une d'elles consistent en l'interrogation sur la réutilisation des urines comme de l'engrais alors qu'elles contiennent des micro-polluants organiques. Plusieurs études ont permis de démontrer que le traitement de ces derniers serait sûrement plus simple si cette collecte sélective avait lieu. Une des autres interrogations, plus difficile à résoudre, consiste à l'utilisation nécessaire de camions-citernes pour la réalisation de ce projet.

Ainsi, même si il subsiste des interrogations quant à la viabilité du projet, il est néanmoins certain que le système d'assainissement actuel n'est pas « durable » et qu'il est nécessaire de commencer à étudier des méthodes alternatives.


(1) CABY Amandine, Quel intérêt et quelle opportunité de mettre en place une collecte sélective des urines en milieu urbain dense ? Mémoire de thèse professionnelle pour le Mastère spécialisé PAPDD. 2012-2013

(2) ESCULIER Fabien, Optimisation des cycles carbone, azote et phosphore.