
Loi sur l'économie sociale et solidaire : des avancées pour les éco-organismes
Par Natacha GUEGHEROUNI
Juriste stagiaire droit de l'environnement
FIDAL
Posté le: 28/08/2014 14:38
L'économie sociale et solidaire (ou ESS) « désigne un ensemble d'entreprises organisées sous forme de coopératives, mutuelles, associations, ou fondations, dont le fonctionnement interne et les activités sont fondés sur un principe de solidarité et d'utilité sociale » (1).
Ces entreprises adoptent un mode de gestion spécifique, qui laisse une part importante à la participation de l'ensemble des acteurs, et donne la priorité à l'investissement plutôt qu'aux profits individuels.
La loi sur l'économie sociale et solidaire, promulguée le 31 juillet 2014 (2), tente de reconnaître la place que prennent ces entreprises dans l'économie française. La loi comporte donc des définitions attendues, notamment celle de l'économie sociale et solidaire. Elle facilite l'accès des personnes morales répondant aux critères légaux de l'ESS aux financements publics, d'une particulière importance dans certains secteurs comme l'aide sociale. Enfin, la loi consolide, simplifie et rend plus attractif le régime juridique applicable aux sociétés coopératives.
Comment la question de la responsabilité élargie du producteur de déchets s'insère-t-elle dans ce cadre ? Est-ce qu'elle peut se rattacher à l'économie sociale et solidaire ? Le législateur a répondu positivement à cette dernière question, en incluant dans la loi un Titre VIII intitulé « Dispositions relatives aux éco-organismes ».
Effectivement, la définition de l'ESS se recoupe avec certains des critères nécessaires à l'obtention du statut d'éco-organisme agréé (3). Les points communs les plus saillants sont l'absence de but lucratif, et l'importance du financement public dans le fonctionnement de ces organismes.
Sans trancher véritablement sur le statut des éco-organismes et leur place dans le paysage économique et juridique français (4), la loi ESS répond toutefois à certaines questions importantes, via des modifications apportées à l'article L. 541-10 du code de l'environnement.
- L'objectif des éco-organismes : la prévention des déchets
La confusion peut être aisée quant à déterminer le but poursuivi par les éco-organismes. En effet, ces derniers ne doivent pas poursuivre de but lucratif pour pouvoir obtenir l'agrément de l'Etat, mais certains éco-organismes agréés sont des sociétés commerciales. Toutefois, les deux objectifs sont conciliés, car les éco-organismes agréés affichent un résultat d'exploitation nul : l'intégralité des recettes perçues au titre du financement par l'éco-contribution est utilisée dans l'accomplissement de la mission de gestion des déchets (5).
La loi ESS prévoit désormais que l'objectif des éco-organismes agréés est la prévention des déchets, un objectif qui fait écho au principe de responsabilité élargie du producteur (REP) à l'origine de la création de ces organismes.
- L'encadrement de la communication des éco-organismes
La question de la communication à l'intérieur d'une même filière est importante dans l'optique de réduire les coûts de collecte pour les éco-organismes opérationnels, c'est-à-dire ceux qui prennent en charge la gestion des déchets en plus du financement de ce service. Une communication efficace, évaluée et surtout harmonisée permet de donner une information claire aux consommateurs, ce qui améliore le tri des déchets à la source. Mieux triés, les déchets sont mieux et davantage recyclés.
Pour les éco-organismes qui dépendent davantage de financements publics, il s'agit également de s'assurer d'une bonne utilisation des fonds, afin qu'ils ne soient pas gaspillés dans des campagnes inefficaces.
La loi prévoit donc dans son article 88 de modifier les dispositions de l'article L. 541-10 II 1° du code de l'environnement pour y ajouter la formule suivante : « incluant la communication relative à la prévention et à la gestion des déchets, dont la contribution financière aux actions de communication inter-filières menées par les pouvoirs publics. Le montant, le plafond et les modalités de recouvrement de cette contribution financière sont déterminés par le cahier des charges; ».
- L'agrément de la filière pneumatiques
Cette filière, qui résulte d'un accord volontaire entre les principaux producteurs de pneumatiques, a progressivement pris son essor au cours des dernières années, mais n'avait pas encore reçu d'agrément de l'Etat. Avec la loi ESS, c'est désormais chose faite.
- L'approbation des systèmes individuels de REP
Enfin, la loi ESS prévoit la possibilité d'approuver les systèmes individuels de collecte mis en place par les producteurs pour certains produits spécifiques à compter du 1er janvier 2020.
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(1) http://www.economie.gouv.fr/cedef/economie-sociale-et-solidaire
(2) Loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 relative à l'économie sociale et solidaire, JORF n°0176 du 1 août 2014 page 12666
(3) Article L. 541-10 du code de l'environnement
(4) Une question récurrente, notamment parce que le critère de la poursuite d'un but non lucratif peut être particulièrement malmené : voir Rapport d'information de l'Assemblée nationale n° 1347, septembre 2013.
(5) C'est notamment le cas d'Eco-Emballages, voir Rapport annuel 2012.