Les restrictions de circulation sont d’actualité.
Le 18 juillet 2014, le préfet de la région Rhône-Alpes et les préfets de Savoie et de Haute-Savoie ont approuvé par arrêté préfectoral, la mise en place d'un dispositif de restriction de la circulation routière en cas de pics de pollution atmosphérique dans la vallée de l'Arve, la vallée Maurienne-Tarentaise et la zone urbaine des Pays de Savoie. La région de l’Ile de France a, elle aussi, adopté un arrêté inter préfectoral le 7 juillet 2014.
Le 17 mars dernier la circulation alternée avait été instaurée pour la première fois. La circulation était interdite pour les plaques impaires, et pour les véhicules légers à pot non catalysé, ainsi que pour les poids lourds (de plus de 3,5 tonnes). Les véhicules hybrides et électriques n’étaient pas concernés.

Aujourd’hui, de nouveaux dispositifs de circulation alternée sont en cours de préparation. Sous quelles conditions ce dispositif sera-t-il enclenché ? (I) Ces meures seront-elles suffisantes pour préserver la qualité de l’air ? (II)


I) Les conditions de déclenchement des mesures de circulation alternées


De l’origine (A) à la mise en œuvre des mesures de circulation alternée (B).


A) Les origines du principe de circulation alternée


La pollution atmosphérique est une des formes de pollution le plus tôt prises en compte par le droit, avec le décret impérial de 1810 relatif aux Manufactures et Ateliers qui répandent une odeur insalubre ou incommode. La définition légale de cette notion ne va apparaitre qu’un siècle plus tard, avec la loi Lepage du 30 décembre 1996 sur l’air et l’utilisation rationnelle de l’énergie (dite loi « LAURE »).

Selon l’article L220-2 Code de l’environnement, constitue une pollution atmosphérique « l’introduction par l’homme directement ou indirectement dans l’atmosphère et les espaces clos d’agents chimiques, biologiques ou physiques ayant des conséquences préjudiciables de nature à mettre en danger la santé humaine, à nuire aux ressources biologiques et aux écosystèmes, à influer sur les changements climatiques, à détériorer les biens matériels, et à provoquer des nuisances olfactives excessives ».

La loi du 30 décembre 1996 sur l'air et l'utilisation rationnelle de l'énergie (dite « loi Lepage »). En cas de, dépassement ou de risque de dépassement des seuils d’alerte, le préfet doit d’abord informer la population, puis, prendre des mesures d’urgence afin de réduire l’ampleur et le pic de pollution. Le préfet peut avoir recours à deux types de mesures. Soit, en réduisant les émissions industrielles si c’est l’origine de la pollution, comme en cas de pollution due au souffre. Ou encore, en restreignant les sources fixes, telles que des installations classées, ou encore, en prenant des mesures envers les automobilistes.


B) La mise en œuvre de la circulation alternée : le dépassement d’un seuil de pollution


La surveillance de la qualité de l’air est assurée par l’État, dans le respect du principe de libre administration, avec le concours des collectivités territoriales. Les seuils de qualité de l’air, aussi appelés « normes » ou « valeurs-guides » sont fixés par décret en Conseil d’État suite à l’avis de l'Agence nationale chargée de la sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ci-après « ANSES »), qui déterminer elle-même les seuils sur la base des données de l’Organisation mondiale de la santé.

Un dispositif de surveillance de la qualité de l'air et de ses effets sur la santé et sur l'environnement couvre l'ensemble du territoire national. Les modalités de surveillance sont adaptées aux besoins de chaque zone, notamment ceux des agglomérations de plus de 100 000 habitants (article L221-2 du code de l’environnement).

En cas d'épisode de pollution, lorsque les normes de qualité de l'air mentionnées à l'article L. 221-1 ne sont pas respectées ou risquent de ne pas l'être, le préfet en informe immédiatement le public et prend des mesures propres à limiter l'ampleur et les effets de la pointe de pollution sur la population.

Ces mesures, prises en application du plan de protection de l'atmosphère (PPA) lorsqu'il existe _ comme dans le cas de communes de plus de 250 000 habitants, ou en cas de non respects de diverses normes de qualité de l’air dans certaines zones_ et après information des maires intéressés, comportent un dispositif de restriction ou de suspension des activités concourant aux pointes de pollution, y compris, le cas échéant, de la circulation des véhicules, et de réduction des émissions des sources fixes et mobiles.

Notons que, conformément à l’article L223-2 du Code de l’environnement : « En cas de mesure de restriction ou de suspension de la circulation des véhicules décidée par le préfet dans le cadre d'une procédure d'alerte, l'accès aux réseaux de transport public en commun de voyageurs est assuré gratuitement. »


II) Les projets en cours auront-ils un effet bénéfique pour préserver la qualité de l’air ?


Les différents projets de circulation alternée établissent dans quelle circonstance sont applicables des restrictions de circulation (A’). Peut-on espérer une amélioration de la qualité de l’air grace à ces dispositifs ? (B’)


A’) Les projets de circulation alternée en cours


Après une consultation du 26 mai 2014, le préfet de Rhône Alpes a annoncé la mise en place d’un dispositif de circulation alternée en cas d’enregistrement de pic de pollution. La mise en œuvre de cette procédure, dans le cadre d’un plan de protection de l’atmosphère de la vallée de l’Avre, prescrit qu’en cas de pic de pollution, certains poids lourds ne pourront plus circuler dans une certaine zone.

D’abord, les poids lourds les plus polluants, soit norme inférieure à Euro III, ne pourront plus circuler. La norme Euro III est une norme européenne d’émission, émanant de différents règlements de l’Union européenne fixant les limites maximales de rejets polluants pour les véhicules roulants, avec des normes de plus en plus sévères pour les véhicules neufs afin de réduire la pollution atmosphérique.
Pour rappel, les dates d’entrée en vigueur des différentes normes sont les suivantes pour les poids lourds : Euro 0: 1er octobre 1990 - Euro 1:1er octobre 1993 - Euro 2:1er octobre 1996 - Euro 3:1er octobre 2001 - Euro 4:1er octobre 2006 ; Euro 5 - 1er octobre 2009 ; Euro 6 - 1er janvier 2014.
Ainsi, les poids lourds Euro 1 et Euro 2, mis en circulation avant le 1er octobre 1996 sont visés par cette mesure.

Ensuite, est concerné un espace de transit déterminé, soit, les vallées de la Maurienne-Tarentaise et dans les zones urbaines des pays de Savoie. Et, le tout, dans la limite de 20 jours par mois comme il était dégagé dans la synthèse relative à la participation du public sur le projet d’arrêté préfectoral.

En Ile de France, l’arrêté inter-préfectoral du 7 juillet 2014, relatif à la procédure d'information-recommandation et d'alerte du public en cas d’épisode de pollution en région d'Ile-de-France prévoit également la mise en œuvre de la circulation alternée. Est alors visée une zone géographique déterminée, et les véhicules ou motocycles dont le numéro d’ordre dans la série de la plaque d’immatriculation est impair ne peuvent circuler que les jours impairs et vis versa. L’arrêté prévoit également les différents dispositifs d’information, ainsi que plusieurs recommandations relatives aux sources fixes et mobiles de pollution. Par exemple, limiter la température maximale des locaux en période de froid à 18°C, éviter l’utilisation d’outils d’entretien extérieur à moteur thermique, tels que les tondeuses à gazon, éviter l’utilisation du bois en chauffage individuel d’agrément ou d’appoint, reporter les activités de brûlage de déchets verts (y compris les déchets agricoles) etc. (article 7 du dit arrêté). Ces dispositions sont particulièrement intéressantes dans la mesure où elles ne se limitent pas à appliquer une circulation alternée qui peut s’avérer insuffisante en cas de pic de pollution.

La mise en œuvre de la circulation alternée a-t-elle un effet réel sur l’amélioration de la qualité de l’air ?


B’) Une mesure aux effets alternés ?


Le déclenchement de la circulation alternée en mars dernier a permis de réduire la pollution atmosphérique à un moment où la qualité de l’air était critique. Cependant, il convient d’avancer que cette mesure n’est qu’une solution parmi d’autres.

D’abord, la pollution atmosphérique la plus dangereuse et nocive pour la santé et l’environnement n’émane pas de pics de pollution occasionnels (même si de plus en plus fréquents), mais d’une pollution continue à laquelle nous sommes constamment exposés. Selon l’Institut national de recherche et de sécurité, les paramètres à prendre en compte pour déterminer la nocivité d’une pollution sont : les concentrations ; la durée de l’exposition ; la nature du polluant ; la fréquence. D’ailleurs, chaque personne est affectée différemment par les pollutions selon leur âge, selon que leur système respiratoire soit affecté ou non, pour les femmes enceintes etc.

Ensuite, la circulation alternée n’empêche pas les véhicules les plus polluants de circuler. En cas de limitation de circulation de poids lourds de catégorie Euro III, comme dans l’exemple mentionné (voir supra I. B.), seule une partie des véhicules sont concernés. De plus, le fait de limiter le transport de Poids Lourds dans une zone ne fait que dérouter le trafic des camions et ne fait que reporter et partager la pollution.

Puis, il n’est pas cohérent d’attendre que le seuil d’alerte soit atteint afin de déclencher la procédure de circulation alternée, il faudrait déclencher la procédure en amont

Enfin, les particules fines dites « PM10 » (particules inférieures à 10 micromètres), les poussières de compositions diverses ne proviennent pas que du transport, mais aussi du chauffage au bois et au fioul, de différentes industrie.

Dès lors, il ne faut pas se limiter à une source de pollution occasionnelle. Afin d’apporter une réelle amélioration de la qualité de l’air, il convient également d’axer les différentes mesures sur les principales sources de pollution continuelles.


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SOURCES :

LEGISLATION :

Décret impérial du 15/10/1810 relatif aux Manufactures et Ateliers qui répandent une odeur insalubre ou incommode.

LOI n° 96-1236 du 30 décembre 1996 sur l'air et l'utilisation rationnelle de l'énergie.

Arrêté inter-préfectoral n°2014-00573 relatif à la procédure d'information-recommandation et d'alerte du public en cas d’épisode de pollution en région d'Ile-de-France.

AUTRES :

« Participation du public sur le projet d’arrêté préfectoral portant organisation de la coordination routière lors des pics de pollution dans les bassins d’air « Vallée de l’Arve », « Vallées Maurienne Tarentaise » et « Zone urbaine des Pays de Savoie » », Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement de Rhône-Alpes, Synthèse des informations, le 7 juillet 2014.

« Estimation de l’impact sanitaire d’une pollution environnementale et évaluation quantitative des risques sanitaires », Groupe de travail, InVs et AFFSET, novembre 2007.

SITES INTERNET :

http://legifrance.gouv.fr/
http://www.actu-environnement.com/
http://www.notre-planete.info/environnement/pollution_air/pollution-atmospherique.php