Le Conseil national des professions de l'automobile (CNPA) a formé un recours contre l’arrêté du 26 novembre 2012 relatif aux prescriptions générales applicables à certains centres de traitement des véhicules hors d’usage (VHU), et imposant un régime plus strict d’enregistrement des Installations classées pour l’environnement (ICPE). Le Conseil d’État, par un arrêt du 16 juillet 2014 rejette cette demande d’annulation, et maintien le régime de l’enregistrement pour la catégorie de centres de destruction concernés. Quelles étaient les revendications du CNPA ? Quelles sont les conséquences pour les centres de destruction de véhicules hors d’usage ?

Il conviendra de déterminer en quoi le régime des ICPE est applicable aux centres de destruction de véhicule (I), puis d’établir quelles sont les conséquences de ce nouveau régime (II).


I) Champ d’application du régime des ICPE aux centres de destruction de véhicules


Il conviendra dans un premier temps de rappeler ce qu’est une installation classée pour la protection de l’environnement (A), pour ensuite de déterminer en quoi le régime des ICPE est applicable aux centres de destruction de véhicules (B).


A) Qu’est-ce qu’une ICPE ?


La définition des ICPE repose sur un l’article L511-1 du Code de l’environnement. Une installation classée est une usine, un atelier, un dépôt, un chantier ou toute autre installation exploitée ou détenue par toute personne publique ou privée, physique ou morale, qui peut présenter des dangers ou des inconvénients pour assurer plusieurs intérêts dont : la commodité du voisinage ; la santé, la sécurité, la salubrité publique ; l’agriculture ; la protection de la nature, de l’environnement et des paysages etc.

Le champ d’application de cet article est précisé dans la nomenclature des installations classées qui va établir une liste d’installations qui ne fonctionneront pas sous un régime de liberté, mais, qui seront soumises à ce régime de police spéciale. Ainsi, en fonction des dangers et inconvénients que leurs installations présentes, elles seront soumises soit à « autorisation » (le régime le plus strict) ; à « enregistrement » ; ou encore, à « déclaration » (régime le moins strict).

La consultation de la nomenclature permet de déterminer quel est le régime applicable à l’activité en cause. La même activité peut relever de plusieurs régimes en considération d’un certain nombre de seuils.

D’ailleurs, le régime applicable peut être amené à évoluer par le biais d’arrêtés de prescription si les intérêts mentionnés à l’article L511-1 du Code de l’environnement le justifient, comme c’est le cas en l’espèce.

Le régime des ICPE sera applicable aux centres de destruction des véhicules s’ils présentent des atteintes à l’environnement, et s’ils sont classifiés dans la nomenclature ICPE.


B) En quoi un centre de destruction de VHU est-il une ICPE?


Conformément à la directive européenne 2000/53/CE du 18 septembre 2000 relative aux véhicules hors d'usage (VHU), transposée par le décret n° 2011-153 du 4 février 2011 et aux articles R. 543-153 et suivants, le traitement des véhicules hors d'usage est opéré en France par deux types d'acteurs : les centres VHU, qui assurent la prise en charge, le stockage, la dépollution et le démontage des véhicules hors d'usage ; et les broyeurs, qui assurent la prise en charge, le stockage et le broyage de véhicules préalablement dépollués et démontés par un centre VHU.
Rappelons d’abord que le véhicule hors d’usage est considéré comme un déchet dangereux (nomenclature déchet, 16 01 04*), l’ensemble des opérations de démontage, et des pièces démontées sont susceptibles de présenter un danger pour la santé et l’environnement.

Ensuite, parmi les activités menées par les centres de destruction de VHU, ces derniers assurent les opérations de dépollution des batteries, des pots catalytiques et des réservoirs de gaz liquéfiés sont retirés etc. (arrêté du 2 mai 2012 relatif aux agréments des exploitants des centres VHU).

Enfin, au regard de la nomenclature ICPE, dans la rubrique créée par le Décret n° 2010-369 du 13 avril 2010 et modifié par le Décret n° 2012-1304 du 26 novembre 2012, les « installation d'entreposage, dépollution, démontage ou découpage de véhicules hors d'usage ou de différents moyens de transports hors d'usage » sont classées de la manière suivante :
1. Dans le cas de véhicules terrestres hors d'usage, la surface de l'installation étant :
a) supérieure ou égale à 30 000 m ² : Autorisation ;
b) Supérieure ou égale à 100 m ² et inférieure à 30 000 m ² : Enregistrement
2. Dans le cas d'autres moyens de transports hors d'usage, la surface de l'installation étant supérieure ou égale à 50 m ² (A-2)

Les centres de destruction de VHU présentent non seulement des dangers pour l’environnement, et ils sont également mentionnés dans la nomenclature ICPE.
C’est pourquoi, le régime des ICPE leur est applicable.

Le Conseil national des professions de l’automobile conteste le passage au régime de l’enregistrement de certains centres de destruction. Il conviendra d’établir quelles sont les prétentions du CNPA, ainsi que quelles sont les conséquences juridiques d’un tel changement de régime.


II) Les nouvelles prescriptions applicables aux centres de destruction de VHU


Le CNPA conteste l’arrêté du 26 novembre 2012 du ministre chargé des installations classées, principalement dans un intérêt de protection de l’activité économique (A’) car de nouvelles prescriptions sont applicables aux centres de destruction de VHU (B’).


A’) Les revendications du CNPA


Le décret du 26 novembre 2012 modifié la rubrique 2712-1 de la nomenclature des installations classées pour la protection de l’environnement relative aux centres de destruction de VHU. Suite à ce décret, le ministre chargé des installations classées a pris, le 26 novembre 2012, un arrêté relatif à la prévention des risques présentés par ces installations désormais soumises, au titre de la rubrique 2712-1 de cette nomenclature, aux dispositions du I de l’article L. 517-12 relatives au régime de l’enregistrement. Le Conseil national des professions de l’automobile conteste cet arrêté dont il demande, à titre principal, l’annulation pour excès de pouvoir de l’ensemble des dispositions.

Les sites dont la surface est comprise entre 100 m2 et 3 ha devront faire l'objet d'une procédure d’enregistrement à la préfecture, tandis qu’au-delà de 3 ha, les sites devront obtenir une autorisation préfectorale, procédure plus longue et plus contraignante. Selon la branche de démolisseurs du CNPA, « cette distinction crée une distorsion entre les centres alors que toutes les tailles de structures travaillent d'une manière générale, de la même façon. La différence s'opère souvent sur la surface des zones de stockage de VHU et de stockage de pièces de réemploi. Les risques environnementaux restent semblables dans tous les centres VHU agréés ».

De même, « en relevant le seuil à 100 m2, alors qu’une entreprise de recyclage était soumise à autorisation préfectorale dès 50 m2, l’administration ouvre encore plus grande la porte aux chantiers sauvages ».

Enfin, l’arrêté définit des règles en matière d'alerte et de lutte contre l'incendie et de sécurité, qualifiée comme étant des « mesures disproportionnées par rapport aux risques réel » par le CNPA.

La principale contestation du CNPA porte, malgré les justifications environnementales incontestables, sur une question de sécurité juridique, la multitude de régimes applicables et qui s’enchainent implique de nouveaux investissements pour les industries de destruction de véhicules.

Le Conseil d’État dans un arrêt du 16 juillet 2014 rejette cette demande d’annulation du CNPA en considérant que le passage à un régime d’enregistrement de ces centres de destruction est justifié par des questions de protection de l’environnement et de la santé humaine, et ne porte pas atteinte au principe de liberté d’entreprendre.


B’) La conséquence du passage au régime de l’enregistrement :


L’enregistrement désigne un régime d’autorisation simplifié pour accélérer la procédure d’inscription c’est pourquoi les études environnementales et l’enquête publique ne sont pas exigées contrairement au régime de l’autorisation.

Ce régime est applicable aux installations qui comportent un danger ou des inconvénients graves (article L511-1 code de l’environnement), et susceptibles de prescriptions générales des ministres.

Il convient de noter que dans deux situations, le préfet pourra néanmoins décider de basculer l’enregistrement vers l’autorisation. D’abord, si la sensibilité environnementale du milieu le justifie, en cas de cumul d’incidences négatives par exemple si plusieurs installations classées sont prévues sur le même site ; Ou encore, si l’installation par sa proximité ou sa connexité avec une installation soumise à autorisation ayant le même exploitant est de nature à en modifier les dangers ou les inconvénients.

De nouvelles prescriptions règlementaires sont applicables à l’installation, comme indiqué préalablement dans le (II, A). Les centres de destruction de véhicules doivent se conformer à l’arrêté du 26 novembre 2012 relatif aux prescriptions générales applicables aux installations classées relevant du régime de l'enregistrement au titre de la rubrique n° 2712-1 (voir : http://www.ineris.fr/aida/consultation_document/22371).

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** SOURCES :

*LEGISLATION

Directive européenne 2000/53/CE du 18 septembre 2000 relative aux véhicules hors d'usage (VHU)

Arrêté du 2 mai 2012 relatif aux agréments des exploitants des centres VHU et aux agréments des exploitants des installations de broyage de véhicules hors d'usage.

*JURISPRUDENCE

Conseil d’État, 6ème et 1ère sous-sections réunies, le 16 juillet 2014, N° 365522

*SITES INTERNET

http://www.ineris.fr/aida/
http://www.actu-environnement.com/
http://legifrance.gouv.fr/