Le mécanisme des garanties financières vise à assurer, en cas de défaillance de l’exploitant d’une ICPE, la surveillance et le maintien en sécurité de l’installation ainsi que des interventions éventuelles en cas d’accident et de pollution avant ou après la fermeture du site.

Les garanties financières concernent les installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE) soumises à autorisation, au titre de l’article L512-2 du code de l’environnement, ainsi que, depuis le décret n°2012-633 du 3 mai 2012 (1), les installations de transit, regroupement, tri ou traitement des déchets soumises à enregistrement susceptibles, en raison de la nature et de la quantité des produits et déchets détenus, d’être à l’origine de pollutions importantes des sols ou des eaux. Le champ d’application ainsi élargi de cette obligation de constituer des garanties financières pour l’exploitant a été précisé par trois arrêtés d’application publiés au Journal Officiel en 2012 (2).

Par ailleurs, selon l’article R516-2 du code de l’environnement, la constitution des garanties financières par l’exploitant peut notamment résulter d’un fonds de garantie privé, proposé par un secteur d’activité et dont la capacité financière adéquate est définie par arrêté ministériel.
Cette dernière possibilité est désormais encadrée par un arrêté du 5 février 2014 (3) (II).

Eu égard aux nombreuses controverses quant à l’interprétation des modalités de calcul du montant des garanties financières, une note de la Directive générale de la prévention des risques (DGPR) du 20 novembre 2013 apporte de précieuses clarifications sur le calcul des garanties (I).

I- Les précisions apportées par la note de la DGPR du 20 novembre 2013 sur les modalités de constitution des garanties financières

a) La proposition de calcul des garanties financières

Pour rappel, la proposition de calcul des garanties financières pour les installations nouvelles doit, selon l’article R512-5 du code de l’environnement, être intégrée à la demande d’autorisation. De plus, cette proposition s’appuie soit une méthode forfaitaire de calcul du coût des opérations de mise en sécurité du site de l’installation (articles R512-39-1 et R512-46-25 du code de l’environnement), soit sur la base d’une méthode de calcul forfaitaire propre à une branche professionnelle et approuvée par décision du ministre chargé des installations classées.

Concernant le calcul des garanties, la note précise qu’il doit être établi pour les installations soumises à garanties financières et pour les installations connexes directement liées à l’activité de l’installation soumise à garanties. La note entend alors par installation connexe, toutes installations nécessaires au fonctionnement de l’installation soumise à garanties en intégrant les déchets de toute nature ou les produits dangereux générés et utilisés par l’installation.
Par conséquent, sont concernés les dépôts pétroliers au sein des raffineries, ou encore les déchets produits dans l’installation soumise à garanties financières mais entreposés sur le site hors de cette installation.
Par ailleurs, les coûts de surveillance de l’environnement, l’interdiction d’accès au site et le gardiennage doivent être établis pour les installations correspondantes.
En revanche, la présente note précise que ne sont pas pris en compte les surfaces de parkings des voitures lorsque seul le traitement de surface est soumis à garanties financières, ou encore les réserves foncières ou zone non exploitées.

La présente note précise aussi la procédure à suivre lorsqu’au sein d’un même site, des installations différentes sont concernées par la constitution de garanties financières à partir du 1er juillet 2012 et du 1er juillet 2017. Un premier calcul aurait dû être établi pour le 31 décembre 2013 et une attestation de constitution de garanties financières sera exigée à partir du 1er juillet 2014 pour les installations devant constituer des garanties à partir du 1er juillet 2012. Pour le second type d’installations concernées, le calcul sera complété le 31 décembre 2018. Enfin, une nouvelle attestation sera fournie le 1er juillet 2019 pour garantir l’ensemble des installations.

Il convient de préciser que les installations soumises à garanties financières n’ont pas à constituer leurs garanties lorsque le montant calculé est inférieur à 75 000 euros (le seuil doit être apprécié au regard du montant global nécessaire pour couvrir les garanties financières du site). Toutefois, l’exploitant doit transmettre les éléments de calcul dans les mêmes délais que pour les autres installations. Le préfet actera par simple courrier que le seuil de 75 000 euros n’est pas atteint, il peut aussi, par arrêté préfectoral, fixer certains éléments qui ne l’étaient pas déjà (comme la quantité de déchets maximale, la clôture, les piézomètres…). Enfin, si le seuil de 75 000 euros n’est pas atteint, l’exploitant n’est pas soumis à l’obligation d’actualiser le montant des garanties tous les cinq ans. Cependant le changement d’exploitant reste soumis à autorisation.

b) Le périmètre du calcul du montant des garanties financières

Le montant des garanties financières est établi par le préfet à partir de la proposition de calcul de l’exploitant, il sera réajusté lorsque l’évaluation proposée est sous estimée, à partir de la méthode forfaitaire de calcul et du retour d’expérience des coûts généralement constatés.

Le calcul du montant des garanties doit prendre en compte la gestion des produits dangereux et des déchets stockés sur le site. Il s’agit de l’évaluation des coûts d’élimination des déchets et produits dangereux pour les quantités maximales pouvant être stockées sur site. Concernant les produits dangereux et les déchets pouvant être vendus ou enlevés du site à titre gratuit, le coût unitaire à prendre en compte est égal à zéro. Seulement, l’exploitant doit prouver qu’il vend ou cède régulièrement les mêmes déchets (coût du transport compris). A défaut, le montant doit prendre en compte le prix du marché correspondant à l’élimination.
La note apporte aussi des précisions sur les installations de traitement de déchets et la prise en compte des terres excavées.

A propos du coût de clôture, le périmètre à prendre en compte comprend l’installation soumise à garantie et les installations connexes. Dans le cas d’une clôture déjà existante sur le site, le coût de clôture peut être considéré comme nul. Cependant si le retour d’expérience sur le site montre que les clôtures sont régulièrement endommagées et qu’il est difficile de garantir la pérennité de la clôture existante, l’inspection des installations classées peut proposer au préfet de prendre en compte un coût de clôture.

Concernant la surveillance de l’installation sur l’environnement, la note précise la prise en compte du nombre de piézomètre à installer (défini en fonction de la vulnérabilité des nappes et du risque de pollution). Une étude sur le réseau de contrôle de la qualité des eaux souterraines comportant le nombre de piézomètres à installer, leur implantation ainsi que la nature des paramètres à contrôler devra être menée si elle n’a pas été déjà réalisée.

Enfin, sur le coût du gardiennage, l’exploitant doit évaluer le nombre d’heure de gardiennage nécessaire pendant six mois (une surveillance plus courte est possible sous conditions). Le gardiennage doit porter sur l’installation soumise à garanties financières et ses installations connexes. Par ailleurs, l’exploitant peut proposer d’autres systèmes de surveillance comme la vidéosurveillance. La note propose un montant raisonnable de 15 000 euros au vu des pratiques usuellement observées. Il faut souligner que, si une installation soumise à garanties est exploitée par un opérateur indépendant au sein d’un site déjà surveillé et gardienné, alors le coût de gardiennage peut être évalué à zéro euro.

c) La notion d’installation nouvelle

Les exploitants concernés par cette obligation doivent présenter au préfet un document attestant la constitution des garanties pour les installations existantes et pour les installations nouvelles avant la mise en activité de leurs installations.

La DGPR précise alors qu’est considérée comme une installation nouvelle :
- Une installation dont le pétitionnaire a transmis la demande d’autorisation avant le 1er juillet 2012 et qui est en cours d’instruction (y compris celles devant passer en enquête publique);
- Une installation dont le pétitionnaire transmet son dossier de demande d’autorisation au préfet après le 1er juillet 2012 ;
-Une installation faisant l’objet d’une régularisation car elle exploitait sans autorisation (l’exploitant doit alors transmettre son attestation de constitution dans les deux mois suivants l’arrêté préfectoral de régularisation).
- Une installation qui passe du régime de la déclaration au régime de l’autorisation à la suite d’une augmentation de capacité (les garanties financières devant alors être constituées avant l’augmentation) ;
- Une installation nouvelle soumise à garanties financières implantée sur un site comprenant déjà une ou plusieurs installations soumises aussi à garanties.

On peut remarquer qu’une installation déjà autorisée au 1er juillet 2012 mais pas encore mise en service est considérée comme une installation existante.

Enfin, si sur un site nouveau, plusieurs installations sont soumises à garanties financières, la note précise que les garanties pourront être constituées au fur et à mesure de la mise en service des installations.

La note contient un tableau récapitulatif des échéances de constitution des garanties financières en fonction du type d’installation et du type de garants.

d) La modification substantielle d’une installation

Dans le cas d’une demande d’autorisation de modification substantielle de l’installation, le montant des garanties doit être révisé pour prendre en compte cette modification. L’exploitant devra alors transmettre son attestation de constitution avant la mise en service de la modification substantielle.
S’il s’agit d’une installation existante au 1er juillet 2012 qui n’a pas encore fourni le calcul du montant des garanties, celui-ci sera fixé dans l’arrêté préfectoral autorisant la modification substantielle conformément aux échéances pour les installations existantes.
Le dossier d’autorisation de modification substantielle doit aussi prendre en compte un état des sols tels que prévu à l’article L512-18 du code de l’environnement.
Enfin, lorsqu’il s’agit de modifications importantes, non substantielles, mais modifiant les conditions d’exploitation conduisant à une modification des garanties financières, un nouveau calcul sera proposé par l’exploitant et le nouveau montant sera fixé par arrêté préfectoral complémentaire.

II- Les apports de l’arrêté du 5 février 2014 sur le fonds de garantie privé

L’arrêté du 5 février 2014 est venu définir les modalités de constitution du fonds de garantie privé.

a) La notion de fonds de garantie privé

Il s’agit d’un fonds de garantie privé proposé par un secteur d’activité.
Selon l’article 1 de l’arrêté, un secteur d’activité est entendu comme « toute organisation représentative d’exploitants d’installations classées pour la protection de l’environnement, soumise aux obligations prévues aux article L516-1 et R516-1 et suivants du code de l’environnement, ayant une activité similaire ».

Ce fonds, dépourvu de personnalité juridique propre, est géré de deux façons :
- Soit par une entreprise autorisée à pratiquer des opérations d’assurance directe au titre de l’article L310-2 du code des assurances ;
- Soit par une société financière agréée visée à l’article L511-9 du code monétaire et financier.

Par conséquent, les relations entre les adhérents au fonds et son gestionnaire ne sont pas gérées par le présent arrêté puisqu’elles relèvent des relations contractuelles régissant le fonds

b) L’engagement du fonds de garantie privé

L’article 2 de l’arrêté précise que l’engagement du fonds doit à tout moment « être égal à la somme des montants des garanties financières que doivent constituer ses adhérents » au titre de l’article L516-1 précité.
Seulement, si cette hauteur d’engagement n’est pas atteinte par les cotisations de ses membres, l’arrêté autorise l’entreprise gestionnaire à compléter elle-même l’engagement.
L’arrêté prévoit que le gestionnaire du fonds de garantie privé est garant des engagements du fonds et, par-delà, des adhérents du fonds. Le gestionnaire se porte alors caution solidaire.
En revanche, il ne s’agit pas d’un contrôle prudentiel, celui-ci reste entre les mains de l’Autorité de contrôle prudentiel dans le cadre du contrôle de l’entreprise gestionnaire.

c) La constitution d’un rapport annuel

L’article 3 de l’arrêté impose au fonds de constituer un rapport annuel au Ministre chargé des installations classées à des fins d’information. Ce rapport permettra au Ministre d’apprécier la situation du fonds de garantie privé au regard des dispositions requises par les articles R516-1 et suivants du code de l’environnement et le présent arrêté.

Ce rapport est constitué, à minima :
- d’une liste des exploitants adhérents au fonds ;
- du montant des garanties financières par exploitant ;
- d’un état des appels en garantie du fonds sur l’année écoulée.

Concernant la forme, l’arrêté précise que le document attestant de la constitution de garanties financières auprès d’un fonds de garantie privé doit être conforme au modèle d’acte de cautionnement solidaire apporté par le gestionnaire d’un fonds de garantie privé, figurant en annexe du présent arrêté.

Désormais, il ne reste qu’une dernière étape pour compléter le dispositif réglementaire des garanties financières, la publication de l’arrêté sur les mesures de gestion de la pollution des sols et eaux souterraines.



(1) Décret 2012-633 du 3 mai 2012 relatif à l’obligation de constituer des garanties financières en vue de la mise en sécurité de certaines installations classées pour la protection de l’environnement.
(2) Arrêté du 31 mai 2012 relatif aux modalités de détermination et d’actualisation du montant des garanties financières pour la mise en sécurité des installations classées et des garanties additionnelles en cas de mise en œuvre de mesures de gestion de la pollution des sols et eaux souterraines. Arrêté du 31 mai 2012 fixant la liste des installations classées soumises à l’obligation de constitution de garanties financières en application du 5° de l’article R516-1 du code de l’environnement ; Modifié par l’arrêté du 20 septembre 2013 modifiant les annexes de l’arrêté du 31 mai 2012. Arrêté du 31 juillet 2012 relatif aux modalités de constitution de garanties financières prévues aux articles R516-1 et suivants du code de l’environnement.
(3) Arrêté du 5 février 2014 (JO du 28 février 2014) encadrant la constitution de garanties financières par le biais d’un fonds de garantie privé prévue au I de l’article R516-2 du code de l’environnement.