I. Des résultats mitigés

1. Le contenu de l’étude

L’étude de l’eau potable a porté sur 6 critères (choisies parmi plus de 600) recouvrant trois types de contaminations :

- Les pollutions dues à un mauvais fonctionnement du traitement d’assainissement ; Il a été vérifié dans ce cadre la qualité bactériologique des eaux et leur teneur en aluminium.

- Les pollutions naturelles de la ressource, c’est-à-dire la radioactivité naturelle présente dans l’eau.

- Les pollutions d’origine agricole ;il s’agit des différents pesticides, des nitrates, issus des apports d’engrais et de fumures animales et du sélénium, composant naturel toxique de la croûte terrestre.

L’analyse a été effectuée au niveau de chaque réseau de distribution et sur une durée de deux ans et demie. Le seuil de non-conformité a été fixé à 25% des analyses situées en deçà de la limite réglementaire.

2. Les résultats

L’association conclut par une bonne appréciation globale : 98% des français ont accès à une eau de bonne qualité. Une amélioration a eu lieu depuis 2012 : 280 000 consommateurs supplémentaires reçoivent une eau conforme aux critères de bonne qualité.
Toutefois, malgré ce bon résultat apparent, 1 480 000 français n’ont toujours pas accès à une eau conforme.

Certains points important sont à souligner. D’une part, la majorité des pollutions sont toujours retrouvées dans les petites communes situées en zone rurale et cet écart entre les zones urbaines et rurales s’est encore creusé depuis 2012 : Le niveau de contamination a baissé de 35% pour les villes de plus de 5000 habitants et a augmenté de 8% pour les villages de moins de 500 habitants.
D’autre part, concernant les causes des pollutions, les pollutions agricoles restent la première cause de contamination de l’eau, avec 63%, suivies par 33% dues à des défauts de traitement de l’eau et 4% de pollutions dues à la radioactivité naturelle.

L’agriculture reste la cause première de la pollution de l’eau potable. Les zones les plus touchées par les pesticides sont, logiquement, les zones de production agricole intense. Les zones de grandes cultures et zones maraichères sont quant à elles les plus touchées par la pollution aux nitrates, mais il est intéressant de souligner le « paradoxe Breton », qui malgré une forte présence de nitrates dans les rivières de la région, sont absents de l’eau du robinet grâce notamment à la technique consistant à diluer les eaux polluées avec des eaux respectant la norme.

Les défauts de traitement de l’eau représentent un tiers des causes de non-conformité. Il s’agit pour l’essentiel d’installations de traitement de faible capacité mal réglées car insuffisamment contrôlées. On retrouve ces situations en large majorité dans les zones rurales ou montagneuses.

Enfin, la radioactivité reste une contamination marginale sur l’ensemble du territoire, avec au total 50 500 français susceptibles d’être alimentés par une eau trop radioactive.


II. Les dispositifs mis en œuvre pour pallier aux pollutions de l’eau potable

1. Trop de fermeture de captages

Un captage est un dispositif de prélèvement d’eau dans l’environnement naturel, à partir d’une source, d’un cours d’eau, d’un barrage ou d’une nappe d’eau souterraine. En France, 34 000 captages sont destinés à la fabrication d’eau potable mais chaque année 400 d’entre eux sont fermés pour mauvaise qualité des eaux.
Malgré une loi du 16 décembre 1964 imposant la protection des captages d’eau potable, il était calculé en 2009 que 40% de l’eau consommée est issue de captages non protégés. Ce non-respect serait dû principalement à l’opposition des professions agricoles qui refusent les limitations d’utilisations d’intrants sur les zones alimentant les captages.

Fort de ce constat, les lois Grenelle 1 et 2 qui ont fait suite au Grenelle de l’environnement ont prévu de nombreuses mesures relatives à la bonne qualité écologique de l’eau. L’article 27 de la loi Grenelle 1 prévoitcomme premier objectifen matière d’eau d'atteindre ou de conserver d'ici à 2015 le bon état écologique ou le bon potentiel de l’eau et comme deuxième objectif de « garantir l'approvisionnement durable en eau de bonne qualité propre à satisfaire les besoins essentiels des citoyens ». Concernant la protection des capteurs d’eau, ce même article dispose que « des plans d'action seront mis en œuvre en association étroite avec les agences de l'eau pour assurer la protection des cinq cents captages les plus menacés par les pollutions diffuses, notamment les nitrates et produits phytosanitaires ». La loi précise que la priorité sera donnée aux surfaces d’agriculture biologique et d’agricultures faiblement utilisatrices d’intrants.

2. Les faiblesses des mesures préventives

La procédure d’application de ces objectifs comporte trois phases : la délimitation des zones à protéger, l’étude environnementale de la zone et l’établissement de plans d’actions comprenant la liste des mesures à mettre en œuvre pour assurer la protection des captages contre la pollution. Cette troisième phase montre des difficultés de mise en œuvre.

En effet, comme le prévoit la loi Grenelle 1, la mise en œuvre de plans d’actions doit être réalisée en étroite collaboration entre de nombreux acteurs.

Or, les actions rencontrent des résistances de la part de certains de ces acteurs. Une partie de la profession agricole refuse ces mesures qui risquent de faire baisser leur productivité. Par ailleurs, les mesures prises par les collectivités locales ignorent bien souvent les mesures imposées par les lois Grenelle pour leur préférer des recommandations sans aucun caractère contraignant.

Enfin, un rôle très important revient aux agences de l’eau. Ces établissements publics administratifs agissant sous la tutelle du Ministère de l’Environnement et au nombre de 6 dans la métropole disposent en effet d’un budget conséquent leur permettant d’attribuer des subventions, des primes de résultats et des avances remboursables. Elles ont été visées spécifiquement par la loi Grenelle 1 selon laquelle « les agences de l’eau développeront un programme spécifique sur les aires d’alimentation de captage et adapteront leurs ressources ainsi que leurs concours financiers à cet effet ». Or, il a été constaté qu’une grande partie du budget reste attribuée à la dépollution des eaux, pour n’en laisser que trop peu aux actions de prévention, dont la protection des captages. Le budget de 13,3 milliards attribué pour la période 2013-2018 devrait être pensé dans un objectif prioritaire de prévention. Or, l’association UFC - Que Choisir a déploré que seul 6,5% de la part du budget prévu contre la pollution ne soit attribué à la lutte contre la pollution agricole, une part trop minime pour atteindre les objectifs dans les meilleurs délais.