Partant du constat que l’extension de l’urbanisation pouvait avoir pour conséquence d’implanter des habitations autour d’installations dangereuses, le législateur a voulu encadrer cette évolution par la création des plans de prévention des risques technologiques (PPRT) qui ont été instaurés par la loi du 30 juillet 2003, codifiée aux articles L.515-15 et L.515-25 du Code de l’environnement. Dix ans après la création des PPRT, il est intéressant de voir comment se porte ce dispositif, à travers l’étude de la règlementation régissant les PPRT (I) et des mesures pouvant être mises en œuvre par ces documents (II) mais également quels sont les obstacles majeurs auxquels il peut se heurter, à savoir principalement le financement de ces plans (III) et les délais de mise en œuvre de ces derniers (IV).

I. La règlementation des PPRT.

Après l’entrée en vigueur de la loi du 30 juillet 2003 relative à la prévention des risques technologiques majeurs créant les PPRT, d’autres textes sont venus en modifier le contenu. La loi principale postérieure est celle du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement, dite loi Grenelle 2. Un décret du 24 février 2011 est également venu modifier les dispositions réglementaires relatives au PPRT.la circulaire du 10 mai 2012 est intervenue pour préciser les règles méthodologiques applicables aux études de dangers, à l’appréciation de la démarche de réduction du risque à la source et aux plans de prévention de risques technologiques dans les installations classées, en application de la loi de 2003.

Les PPRT sont nés du constat de la nécessité d’établir un périmètre de sécurité autour des installations classées les plus potentiellement dangereuses. Ces plans sont donc des servitudes d’utilité publique instaurées autour de ces installations. Les installations concernées sont celles soumises à autorisation avec servitudes d’utilité publique (apparaissant sous les lettres AS dans la nomenclature des installations classées) ainsi que celles visées à l’article 3-1 du Code minier, à savoir les installations de stockage de gaz naturel, d’hydrocarbures liquides, liquéfiés ou gazeux ou de produits chimiques à destination industrielle. En effet, ces installations sont susceptibles d’être à l’origine d’accidents pouvant avoir des effets sur la salubrité, la santé et la sécurité publiques. Ces plans ont alors pour vocation de protéger la population environnante, en limitant les conséquences d’un éventuel accident pour elle. La loi Grenelle 2 pose le principe selon lequel les PPRT ne concernent que les installations créées avant le 31 juillet 2003, celles créées postérieurement à l’entrée en vigueur du dispositif devant prévoir des mesures de prévention suffisantes pour pouvoir être autorisées.

II. Les mesures prescrites par les PPRT.

Les PPRT ont 3 objectifs principaux, à savoir :
- Agir sur l’urbanisation existante
- Maîtriser l’urbanisation future
- Réduire le risque à la source dès que la situation l’exige.
Leur contenu est précisé par l’article R.515-41 du Code de l’environnement.

Pour mener à bien ces différents objectifs, les PPRT peuvent prévoir plusieurs mesures :
- Les mesures foncières, c’est-à-dire celles concernant l’occupation des sols aux abords de ces installations. Cela concerne les mesures d’expropriation pour cause d’intérêt public, d’interdiction ou de restriction des constructions nouvelles (se matérialisant sous la forme de servitudes d’utilité publique), d’instauration d’un droit de préemption urbain ou d’un droit de délaissement pour le bâti qui préexistait à l’adoption du PPRT.
- Les mesures dites « supplémentaires », c’est-à-dire celles visant à la réduction des risques.
- Les mesures visant à protéger les populations.
- Les recommandations tendant à renforcer la protection des populations.
Selon le type de mesures prescrites par le PPRT, le débiteur de l’obligation de financement de ces mesures sera différent, ce qui explique que la question du financement de ces mesures est un obstacle majeur à la bonne mise en œuvre des PPRT.

III. Le financement des PPRT.

A titre liminaire, il convient de préciser que les mesures de financement n’interviennent qu’une fois le PPRT approuvé. Ces mesures sont financées par l’Etat, les exploitants et les collectivités territoriales compétentes (ou leurs groupements) dès lors qu’ils perçoivent la taxe professionnelle dans le périmètre couvert par le plan.

La première catégorie de mesures pouvant être prescrites par un PPRT, à savoir les mesures foncières, sont financées par l’Etat, les exploitants des installations à l’origine du risque et les collectivités territoriales compétentes. Ils sont responsables du financement de ces mesures après approbation du PPRT. Ces mesures sont celles qui pèsent le plus lourd financièrement, du fait de leur impact sur la propriété privée. Le financement de ces mesures donne lieu à des conventions tripartites entre les différents débiteurs. Cependant, il est fréquent qu’un accord ne soit pas trouvé, c’est pourquoi il a été trouvé un moyen de remédier à cette situation, en fixant un taux de répartition à chacune des parties prenantes.

Les mesures supplémentaires sont financées par les exploitants, l’Etat et les collectivités locales. Cependant, elles ne seront adoptées que dans l’hypothèse où elles permettent de réaliser une économie réelle sur le coût total résultant de la mise en œuvre du PPRT. L’exploitant doit financer au moins un tiers de ces mesures.

Les propriétaires, les exploitants ainsi que les utilisateurs sont responsables des mesures de protection des populations. Afin de limiter le poids de ces mesures, il a été prévu des possibilités de crédit d’impôt mais également que le coût de ces mesures ne devait pas excéder 10% de la valeur du bien concerné. Ces mêmes personnes sont également responsables du financement des recommandations visant le renforcement de la protection des populations.

La multiplicité de ces mesures, la diversité des débiteurs du financement de ces dernières ainsi que la difficulté à trouver des accords rallongent d’autant les délais de procédure d’adoption des PPRT.

IV. Les délais des PPRT.

La question des délais des PPRT est abordée par l’article R.515-40 du Code de l’environnement. Ce dernier prévoit qu’un PPRT doit être approuvé dans le délai maximum de 18 mois après sa prescription. L’approbation du PPRT se fait par voie d’arrêté préfectoral. L’instruction du dossier prévoit également la réalisation d’une enquête publique pour une durée minimale de 30 jours. Ce délai peut être prorogé par arrêté spécialement motivé. Actuellement, 99% des PPRT devant être élaborés sont prescrits et près de 60% ont été approuvés. Si ces chiffres peuvent paraître satisfaisants, ils ne peuvent manquer de surprendre lorsque l’on sait que le délai approbation d’un PPRT est de 18 mois normalement. Ces échéances chiffrées ont été souvent reportées, les objectifs n’étant pas atteints dans les temps. Ces retards peuvent s’expliquer notamment par la faculté de prorogation, ce qui peut parfois conduire à approuver un PPRT près de 4 ans après sa prescription. De plus, les questions de financement sont également responsables de l’allongement des délais d’approbation des PPRT, chaque partie au financement du plan souhaitant en payer le moins possible, ce qui complique la recherche d’accords. Dans une circulaire du 11 avril 2013, le ministère de l’écologie a fixé de nouveaux objectifs, à savoir un taux d’approbation de 75% fin 2013 et de 95% fin 2014. Reste à savoir si ces objectifs seront pour une fois respectés, ou bien s’ils seront une nouvelle fois reportés.