Émergence de notions issues du monde de l’entreprise dans le secteur du transport public de voyageurs :
Par Yann-François LE GOFF
chargé de qualité
VEOLIA transdev
Posté le: 19/09/2013 23:54
La mise en place d’une démarche qualité au sein d’un service public, a introduit des principes et notions qui lui étaient encore inconnus jusque-là , un changement qui a eu pour conséquence l’ouverture de débats et critique.
La qualité managériale demeure un outil issu du monde de l’entreprise et de l’économie, un monde que l’on a l’habitude d’opposer ou du moins de séparer de celui du service public.
Pourtant des efforts ont été entrepris dans le service public en termes de qualité, tout d’abord par la mise en œuvre de la circulaire du 23 février 1989 relative au renouveau du service public, Une évolution complétée par la Charte des services publics de 1992.
La RATP peut être citée en exemple de cette modernisation lorsqu’elle a déployé depuis 1990 une véritable politique de mutation organisationnelle en matière de qualité en axant ces priorités sur les voyageurs. En mettant les clients (et non plus les usagers) et l'écoute de ces derniers au centre de leur préoccupations.
Plus loin encore l’évolution ou plutôt la révolution opérée dans le monde du transport de voyageurs à partir de juillet 2000 a profondément transformé ce secteur, en contractualisant les obligations en termes de qualité de service.
Puis au travers du Contrat Type 2, l’autorité organisatrice attend des entreprises qu’elles offrent à leurs voyageurs un niveau de qualité de service en adéquation avec les normes et étalons de mesures européens mais aussi et surtout en accord avec ce qu’attendent les voyageurs.
Les voyageurs qui exigent alors d'avoir le même niveau de qualité dans le secteur public que dans les entreprises privées.
Ainsi le volet commercial à fait son entrée, et cela depuis de nombreuses années, dans les entreprises de transports et pas seulement au sein des entreprises (plus ou moins) privées mais aussi des entreprises publiques comme la SNCF.
Ce pôle commercial fut en charge de la qualité lors de sa mise en place officielle au début des années 2000 dans les sites, ou lors de la mise en place de la norme ISO ou NF comme ce fut le cas dans certains établissements de Transdev notamment,
Il aura fallu attendre le Contrat Type 1 pour voir apparaître le poste de chargé de qualité, qui a gardé des liens forts avec le commercial, et ceci en toute logique, en effet la qualité de l’offre de service proposé aux clients ayant dans son essence même une grande connotation commerciale. La qualité jouant un rôle des plus pertinents dans un système concurrentiel comme c’est le cas du secteur du transport public de voyageurs hors Île-de-France.
Cette mutation du service public de transport de voyageurs ne s’est pas faite sans critiques, certains ont vu le rapprochement entre le service public et le monde de l’entreprise et de la concurrence « d’un mauvais œil », y voyant ainsi une marchandisation du service public.
Ce terme correspond à l'extension des activités privées de biens et de services (marchands) à un secteur public ou une activité de service public (biens ou services réputés non marchands). Cette marchandisation des services publics désigne donc le fait d'appliquer des règles issues des marchés et de la concurrence jugées plus efficaces. Prenant ainsi diverses formes comme la privatisation, ce terme péjoratif, est le plus souvent utilisé par les adversaires de la mondialisation, considérant cette mutation comme un effet néfaste du libéralisme.
Toute l’ambiguïté est donc la suivante : doit-on poursuivre la mutation du secteur des transports publics dans un souci de progression de la qualité de service au risque de voir disparaître ce qui fait la spécificité du service public à la française ?
Une évolution inévitable selon certains, après tout il ne « s’agit que de survivre purement et simplement dans un monde très concurrentiel »
D’un autre coté il est également légitime de penser que la prise en compte de davantage de qualité ne fait pas pour autant courir un risque de dénaturation voir de disparition du service public.
En effet la qualité offerte aux usagers d’un point de vu général fait partie des critères auxquels doit répondre le service public, cette avancée vers davantage de qualité apparaît alors finalement comme une évolution logique et naturelle du service public.
La mise en œuvre d’une démarche qualité au sein du secteur des transports public de voyageurs ne s'est donc pas faite sans heurts et sans apporter son lot de modifications et de changements.