La prévention liée aux produits chimiques promue et imposée par le Code du travail, et notamment par le livre IV la prévention de certains risques d’exposition, impose à la chaine d’utilisateurs des produits chimiques certaines obligations. En effet, dans le cadre de la protection des utilisateurs et des acheteurs, la réglementation communautaire, transposée dans le Code du travail, exige une information accrue sur lesdits produits. C’est alors en ce sens que la fiche de données de sécurité (FDS) trouve toute son essence (I). Son caractère obligatoire, a forcé le législateur à en définir le contenu (II) et les modalités de diffusion (III).

I. L’obligation de constitution de fiches de données de sécurité

L’article R4411-73 (modifié par le décret n°2012-530 du 19 avril 2012 – article 2), dispose dans sa sous section concernant les fiches de données, que « le fournisseur d'une substance ou mélange dangereux fournit au destinataire de cette substance ou mélange une fiche de données de sécurité conforme aux exigences prévues au titre IV et à l'annexe II du règlement (CE) n° 1907/2006 du Parlement et du Conseil du 18 décembre 2006 concernant l'enregistrement, l'évaluation et l'autorisation des substances chimiques, ainsi que les restrictions applicables à ces substances (REACH), instituant une agence européenne des produits chimiques, modifiant la directive 1999/45/CE et abrogeant le règlement (CEE) n° 793/93 du Conseil et le règlement (CE) n° 1488/94 de la Commission ainsi que la directive 76/769/CEE du Conseil et les directives 91/155/CEE, 93/67/CEE, 93/105/CE et 2000/21/CE de la Commission ».
Il est à noter que cet article n’intègre pas dans son champ d’application la notion d’article telle qu’elle est prévue par la réglementation REACH et CLP. Cette dernière définit comme un objet auquel est donné une forme, une surface, ou un dessin particulier, qui prime sur la composition chimique (exemple : ordinateur, téléphone, pneu, etc.). En effet, l’article R4411-73 ne vise que les substances, constituées d’éléments chimiques et de ses composés à l’état naturel ou fabriqué (exemple : méthane, etc.), et les mélanges, caractérisés par des mélanges ou des solutions constitués de deux substances ou plus (exemple : l’eau de javel, les peintures, le trichloréthylène, etc.

En somme cet article R4411-73 du Code du travail renforce, conformément aux exigences de la réglementation REACH du 18 décembre 2006 du Parlement européen et du Conseil (n°1907/2006 – rectifié concernant l’enregistrement, l’évaluation et l’autorisation des substances chimiques) entré en vigueur le 1er juin 2007, l’obligation de constitution et de communication d’une FDS (fiche de données de sécurité) par le producteur d’une substance. Et ce, afin de renseigner l’utilisateur sur les composantes et les risques liés au produit. Autrement dit, cette fiche constitue l’outil de communication entre le fabricant des substances et des mélanges et les entreprises qui les utilisent.
De plus, le règlement REACH, insiste sur la mise en place d’un système d’enregistrement pour assurer la maitrise des risques liés à l’usage desdits produits chimiques. Et par conséquent l’obligation de constitution d’une FDS consacrée à l’article 31 du règlement.

Par conséquent, toute substance ou mélange mis sur le marché doit avoir sa fiche descriptive de sécurité, FDS. Et ce, afin que l’utilisateur puisse avoir en sa possession toutes les informations relatives au produit et pourvoir l’utiliser en toute précaution pour sa santé, sa sécurité, et assure par la même occasion la protection de l’environnement qui l’entoure. Dans une démarche d’amélioration continue, est libre à l’utilisateur de retourner au fournisseur des critiques ou des éléments supplémentaires concernant le produit chimique utilisé afin de réviser, autant que besoin la FDS de cette substance ou de ce mélange. Le fabricant peut alors prendre ces considérations et procéder à une actualisation de sa fiche de données de sécurité. Il incombera alors à l’entreprise de vérifier la mise à jour de ces FDS, et de les faire respecter au sein de son établissement.

Il peut être précisé que lorsque l’entreprise vend des substances et des mélanges au « grand public », alors, il n’existe pas d’obligation pour cette entreprise de fournir une FDS. Toutefois à ceci se grève une condition qui est celle que la substance ou le mélange doit pouvoir justifier d’une étiquette suffisamment complète pour donner toutes les informations suffisantes requises (relative à la santé, à la sécurité et à l’environnement).

II. Le contenu des fiches de données de sécurité

Cette fiche de données de sécurité est soumise à un formalisme prédéfini qui se décline en seize points. Ces seize points concernent des informations générales relatives aux dangers pour la santé et l’environnement, des indications sur les moyens de protection pour la sécurité du personnel, les mesures à prendre en cas de situations d’urgence, et le transport des mélanges et substances.

En définitive, cette FDS doit comporter, depuis le rectificatif effectué au règlement (UE) n°453/2010 du 7 septembre 2010 (modification des formats 2010 I et 2010 II), les rubriques suivantes :

- L’identification de la substance/ du mélange et de la société/ l’entreprise
- L’identification des dangers
- Composition/ informations sur les composants
- Premiers secours
- Mesures de lutte contre l’incendie
- Mesures à prendre en cas de déversement accidentel
- Manipulation et stockage
- Contrôle de l’exposition/protection individuelle
- Propriétés physiques et chimiques
- Stabilité et réactivité
- Informations toxicologiques
- Informations écologiques
- Considérations relatives à l’élimination
- Informations relatives au transport
- Informations réglementaires
- Autres informations

L’annexe II du règlement REACH donne des précisions sur chacune de ces rubriques. Par exemple, la rubrique 7 décrit entre autre les conditions de stockage des substances et des mélanges visés. Cependant ceci reste une ligne de conduite, mais en aucun cas une obligation formelle pour l’entreprise qui devra nécessairement adapter son stockage en fonction des particularités de son établissement.

Suite à cette modification il a été décidé que, pour l’entreprise qui fabrique ou importe des substances, depuis le 1er décembre 2010 jusqu’au 1er juin 2015, la FDS doit avoir la forme requise par l’annexe II du règlement REACH, classer la substance selon les dispositions du règlement CLP et enfin, indiquer la classification prévue par la directive 67/548. Quant à l’entreprise qui fabrique ou importe des mélanges, depuis le 1er décembre 2012 et jusqu’au 1er juin 2015, la FDS doit avoir elle aussi la forme requise par l’annexe II du règlement REACH. Toutefois, la classification selon les dispositions du règlement CLP n’est pas obligatoire. Si celle-ci est indiquée, elle doit tout de même être en complément de la classification applicable par la directive 1999/45. Il est à noter cependant qu’à partir du 1er juin 2015, seule la classification prévue par le règlement CLP sera mentionnée.

III. La diffusion des fiches de données de sécurité

L'article 31 du règlement REACH prévoit que la FDS doit être fournie « dans une langue officielle des État(s) membre(s) dans lesquels la substance ou la préparation est mise sur le marché, à moins que le ou les États membres concernés en disposent autrement ». Ainsi, une entreprise de l’Union Européenne qui vend des substances ou des mélanges pour être mis sur le marché dans un autre pays de l’Union Européenne doit transmettre la FDS dans la langue appropriée, c’est à dire celle du pays de l’Union Européenne recevant le mélange ou la substance. A contrario, une entreprise qui achète des substances et des mélanges à une autre entreprise de l’Union Européenne doit recevoir la FDS sa langue nationale.

A l’échelle de l’entreprise, l'article R4412-9 du Code du travail prévoit, toujours conformément aux dispositions du règlement REACH, l'employeur doit « communiquer les résultats de l'évaluation des risques sous une forme appropriée, au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail ou, à défaut, aux délégués du personnel et, en l'absence de représentation du personnel, à tout travailleur intervenant dans l'entreprise ainsi qu'au médecin du travail ». Il faut y comprendre que cette évaluation des risques retranscrite à travers à travers le Document Unique (article R4121-1 et suivants du Code du travail), est entre autre, l’analyse et l’application des fiches de données de sécurité dans l’entreprise, en tant que gestion du risque chimique.

Plus concrètement, concernant les fiches de données de sécurité, l’article R4624-4 du Code du travail vient préciser cette notion de gestion du risque adapté face aux produits chimiques. En effet, cet article, crée par le décret n°2012-135 du 30 janvier 2012 (article 1), dispose qu’ « afin d'éviter toute altération de la santé des travailleurs du fait de leur travail, le médecin du travail ou, dans les services de santé au travail interentreprises, l'équipe pluridisciplinaire est informé :
1° De la nature et de la composition des produits utilisés ainsi que de leurs modalités d'emploi. L'employeur transmet notamment au médecin du travail les fiches de données de sécurité délivrées par le fournisseur de ces produits ;
2° Des résultats de toutes les mesures et analyses réalisées dans les domaines mentionnés à l'article R. 4623-1.
Ces FDS sont également transmises par l’employeur au médecin du travail, qui rédigera ainsi la rubrique “risque chimique” de la fiche d’entreprise, et qui assurera la surveillance médicale adaptée aux produits manipulés ».

En conclusion la régime qui encadre les fiches de données de sécurité semble être un régime strictement défini par la règlementation nationale et qui tend vers une uniformatisation sur le plan communautaire.