
Le rôle de l’organisme tiers indépendant dans la vérification des informations environnementales fournies par les sociétés
Par Margaux THIRION
Juriste Droit de l'environnement - Droit de l'urbanisme - Droit Public - Eleve Avocate
Haute Ecole des Avocats Conseils (HEDAC) - Versailles
Posté le: 15/09/2013 14:55
La loi Grenelle II a remédié à l’une des critiques principales faites à l’ancien régime NRE, à savoir l’absence de tout contrôle sérieux des informations produites par les entreprises. Pour cela, un article L.225-102-1 al. 7 est inséré dans le Code de commerce, article prévoyant que « les informations sociales et environnementales figurant ou devant figurer au regard des obligations légales et réglementaires font l’objet d’une vérification par un organisme tiers indépendant ».
Ce tiers vérificateur doit être accrédité par le Comité français d’accréditation (COFRAC). Il doit être compétent et indépendant. De ce fait, il est soumis aux mêmes incompatibilités que celles prévues pour le commissaire aux comptes. Ses missions sont énumérées à l’article R.225-105-2 II du Code de Commerce.
La première mission que doit effectuer ce tiers vérificateur est d’attester que la totalité des informations devant être communiquées sont bien présentes. Cette mission a pour objectif d’éviter que les entreprises ne choisissent les thèmes sur lesquels elles souhaitent communiquer, en fonction de ce qui leur est le plus favorable. C’est également un facteur de comparaison des entreprises, étant donné qu’elles doivent toutes fournir les mêmes informations.
Les sociétés ont la possibilité de ne pas fournir certaines informations, à condition de pouvoir se justifier sérieusement. Le tiers aura alors pour mission de s’assurer que l’entreprise est bien de bonne foi lorsqu’elle recourt à cette faculté.
Le tiers doit ensuite rendre un avis motivé sur la sincérité des informations figurant dans le rapport de gestion. Cet avis se limite aux seules obligations sociales et environnementales du rapport de gestion. De plus, le tiers ne doit pas vérifier le fait que les informations sont exactes mais simplement qu’elles sont sincères, c’est-à-dire qu’elle doit « refléter d’aussi près que possible la réalité » (Y. Guyon, Droit des affaires, t. Economica, 2001, n°412 in Nicolas Cuzacq, « Les nouveautés issues du décret n°2012-557 du 24 avril 2012 relatif aux obligations de transparence des entreprises en matière sociale et environnementale », Revue du droit du travail, 2013, p.15).
Enfin, le tiers doit préciser les diligences qu’il a mises en œuvre pour conduire sa mission de vérification.
Un arrêté ministériel en date du 13 mai 2013 est venu préciser les modalités d’intervention du tiers vérificateur indépendant ainsi que celles visant la conduite de ses missions.
Si le dispositif mis en place par le Grenelle 2 relatif à la vérification des informations environnementales par un tiers indépendant constitue une avancée majeure en matière d’information environnementale du public en droit des sociétés, il n’en reste pas moins que c’est un dispositif perfectible.
Tout d’abord, il est requis que le tiers vérificateur soit indépendant. Or, il est nommé par le directeur général (ou président du directoire) de l’entreprise dont il est chargé de contrôler les informations communiquées. Même s’il est prévu que ce tiers est nommé pour une durée maximum de 6 exercices, il est autorisé que ce même tiers soit nommé une nouvelle fois pour une nouvelle période de 6 ans.
De plus, l’arsenal répressif est totalement absent de ces textes. En effet, aucune sanction n’est prévue à l’encontre du dirigeant qui ne nommerait pas un tiers vérificateur. Il n’existe également aucune sanction réellement dissuasive en cas d’omission ou de publication d’informations erronées. En effet, il est simplement prévu par l’article L.225-102 du Code de commerce que « lorsque le rapport annuel ne comprend pas les mentions prévues au premier alinéa, toute personne intéressée peut demander au président du tribunal statuant en référé d'enjoindre sous astreinte au conseil d'administration ou au directoire, selon le cas, de communiquer ces informations ». Cela n’empêche pas certains auteurs de conclure leur examen de ce dispositif sur une note positive en retenant que « outre les sanctions « officielles », il ne faut pas non plus négliger le risque d’atteinte à l’image de marque d’une société qui sera identifiée par une association, une ONG ou un organisme de comparaison des données comme ne répondant pas aux exigences de reporting environnemental » (Armelle Sandrin-Deforge, « Reporting environnemental : du régime « NRE » au régime « Grenelle 2 » », BDEI, Juillet 2012n°40 p.12).
Les entreprises doivent fournir de nombreuses informations sur leur rapport à l’environnement et les conséquences de leurs activités sur ce dernier, informations devant être intégrées au rapport de gestion et vérifiées par un organisme tiers. Il est regrettable de constater que si le rapport de gestion est bien accessible au public, celui-ci devant être, conformément aux dispositions de l’article L.232-23 I 2° du Code de Commerce, « tenu à la disposition de toute personne en faisant la demande », tel n’est pas le cas du rapport établi par l’organisme tiers vérificateur, ce qui amoindri la portée du rôle de cet organisme mais également l’information du public puisque ce dernier n’a accès qu’à une partie de l’information fournie par les sociétés, sans moyen de savoir si cette information est complète et pertinente.