1- La notion de producteur et de détenteur de déchets

Lorsque l’on parle de gestion d’un déchet, il est possible de différencier le producteur du détenteur, bien que leur responsabilité soit engagée sur les mêmes fondements. Le producteur de déchet est, comme son nom l’indique, celui qui produit le déchet, qui en est à l’origine. Les détenteurs de déchets se distinguent des producteurs par la définition qu’on leur donne. Le détenteur actuel ou antérieur de déchet est l’individu qui exerce la détention des déchets, qui détient physiquement les déchets, mais le détenteur n’est pas obligatoirement le producteur. Néanmoins, il peut être tenu pour responsable en cas d’atteinte à l’environnement ou à la santé humaine.
L’article L 541-2 du Code de l’environnement, issu de la directive du 25 juillet 1975, détermine la responsabilité des producteurs et détenteurs antérieurs des déchets. Selon l'article, est producteur ou détenteur de déchets « toute personne qui produit ou détient des déchets dans des conditions de nature de nature à produire des effets nocifs sur le sol, la flore et la faune, à dégrader les sites ou les paysages, à polluer l’air ou les eaux, à engendrer des bruits ou des odeurs et, d’une façon générale, à porter atteinte à la santé de l’homme et à l’environnement, est tenue d’assurer ou d’en faire assurer l’élimination ». Ledit producteur ou détenteur doit donc assumer toutes les opérations indispensables à l'élimination des déchets de telle sorte que ça ne nuise pas à l'environnement ou à la santé humaine.
L'article L 541-3 du code de l'environnement prévoit que l'Etat peut, après une mise en demeure infructueuse, faire réaliser lui même les travaux d'élimination des déchets et faire supporter ces frais par le responsable, autrement le producteur ou détenteur des déchets. il peut utiliser la consignation de somme de la part du producteur ou détenteur voire utiliser les pouvoirs publics pour recouvrir cette somme de manière forcée.

Par ailleurs, depuis la directive communautaire de 1994, est apparue une responsabilité élargie du producteur de déchets (REP). Le producteur de produits devra, soit instaurer lui même un éco-organisme chargé d'opérer la collecte, le tri et l'élimination des déchets, soit contribuer financièrement à un tel éco-organisme. En général, les producteurs vont se rassembler par filière d'activités pour mettre en place un éco-organisme commun. Le statut des éco-organismes est assez incertain juridiquement puisque certains sont certifiés, agrées, d’autres non.
Enfin, l'ordonnance de 2010 a remplacé le terme élimination par le terme gestion, désormais, le producteur est responsable de la gestion des déchets et non plus uniquement de leur élimination. Autrement dit, il faut considérer le produit tout au long de son cycle de vie, pas seulement lorsqu'il entre dans la catégorie des déchets. La responsabilité du producteur est plus importante puisqu’elle peut être engagée à partir de la fabrication du produit.

2- Le principe de pollueur payeur

Il s’agit d’un des principes fondateurs de la responsabilité environnementale. Il est issu de travaux de l’OCDE et repose sur l’idée que les entreprises doivent prendre en considération les atteintes portées à l’environnement dans le cadre de leurs activités. L’objectif est de mettre en place un processus de responsabilisation des sociétés. La définition de ce principe est que celui qui a généré une nuisance affectant l’environnement ou la santé humaine doit la réparer.
Mis en œuvre par la directive du 25 juillet 1975, le droit des déchets repose sur ce principe et distingue deux principaux types d’élimination des déchets : l’élimination matérielle des déchets, dans laquelle le producteur va mener l’opération d’élimination lui même, et la prise en charge financière de l’élimination, le responsable ne devra qu’assumer cette charge financière sans devoir mener lui même l’opération d’élimination.

Ce principe a également été implicitement consacré dans l’article 4 de la Charte de l’environnement, qui énonce que « toute personne doit contribuer à la réparation des dommages qu’elle cause à l’environnement, dans les conditions définies par la loi ». Le principe de pollueur payeur n’y est pas explicitement évoqué, mais les rédacteurs de la Charte y font référence lorsqu’ils imposent la contribution de l’individu à l’origine de la pollution.

3- Quel responsable en présence de navires abandonnés ou saisis ?

La difficulté de la notion d’abandon d’un navire réside en ce que les différentes parties à la convention de Bâle n’en donnent pas la même définition. Alors que certains Etats membres considèrent qu’un navire abandonné est un navire coulé ou échoué, d’autres incluent également sous ce terme les navires confisqués ou saisis par la justice, notamment en cas de trafics illicites, de décès du propriétaire ou encore des accidents ou naufrages volontaires. Au regard de la décision VII/27 du 29 octobre 2004 sur le délaissement des navires prise par la 7e réunion plénière des Etats membres de la convention de Bâle, la 53e session du Comité de la protection du milieu marin (MEPC) de juillet 2005, a été saisie d’une proposition de mise en place d’un cadre international ayant force obligatoire, visant à traiter les éventuels risques encourus par l’environnement ou la santé humaine du fait de l’abandon de navires à terre ou dans les ports. Mais compte tenu des incertitudes de cet instrument juridique en projet, la réunion consultative des parties contractantes à la convention de Londres de 1972 sur la prévention de la pollution des mers résultant de l’immersion de déchets et du Comité juridique de l’OMI a été amenée à traiter cette question. Il ressort de cette réunion que « le délaissement d’un navire en mer, aux fins de son élimination, constitue une opération d’immersion incontrôlée et, en tant que telle, doit être considérée comme étant une violation de la convention de Londres précitée et de son Protocole de 1996 ; que le délaissement d'un navire à terre ou dans un port, avec ou sans son équipage, ne relève pas de ladite Convention de Londres ou de son Protocole, mais est du ressort de l'Etat du port ; c'est donc à ce dernier d'engager une action en responsabilité mettant en cause l'Etat du pavillon et du propriétaire du navire ; que, de même, le délaissement d'un navire dans les eaux intérieures d'un Etat doit être traité dans le cadre de sa législation ».

En principe, lorsqu’un navire est abandonné, il revient à l’autorité locale de le gérer. La mission parlementaire propose de mettre en place une entité chargée d’apporter un soutien technique, juridique et financier à ces autorités portuaires confrontées aux navires abandonnés. Il s’agirait donc d’une autorité centrale chargée d’assister les autorités locales dans la gestion de ces situations. Elle aurait la possibilité d’assurer le financement des opérations de maintenance et de maintien à quai du navire tout au long de la procédure judiciaire, d’assurer la financement et la conduite des opérations de dépollution et de déconstruction pour les navires abandonnés et d’assurer l’indemnisation des autorités portuaires dans le cadre des procédures de déchéance de propriété.

Certaines dispositions du Code des transports concernent la gestion d’un navire abandonné. L’article L 5242-17 prévoit notamment que « en vue du sauvetage d'une épave maritime ou de la suppression des dangers présentés par une telle épave, il peut être procédé : à la réquisition des personnes et des biens, avec attribution de compétence à l'autorité judiciaire, en ce qui concerne le contentieux du droit à indemnité ; à l'occupation temporaire et à la traversée des propriétés privées ».

L’article L 5242-18 énonce, quant à lui, que « lorsque le propriétaire de l'épave est inconnu ou lorsque, dûment mis en demeure, directement ou en la personne de son représentant, il refuse ou néglige de procéder aux opérations de sauvetage, de récupération, d'enlèvement, de destruction ou à celles destinées à supprimer les dangers que présente cette épave, l'Etat ou l'autorité portuaire mentionnée à l'article L 5331-5, selon le cas peut intervenir d'office, aux frais et risques du propriétaire ».

Les articles L 5141-3 et L 5141-4 du même Code sont spécifiques à la déchéance des droits de propriété et disposent que « si l'état d'abandon persiste après la mise en œuvre des mesures prévues à l'article L 5242-16, la déchéance des droits du propriétaire sur le navire ou l'engin flottant abandonné peut être prononcée par décision de l'autorité administrative compétente. Cette décision ne peut intervenir qu'après mise en demeure au propriétaire de faire cesser, dans un délai qui ne peut être inférieur à un mois, l'état d'abandon dans lequel se trouve son navire ou son engin flottant. En cas de déchéance, le navire ou autre engin flottant abandonné ne peut être vendu au profit de l'Etat qu'à l'expiration d'un délai de deux mois et sous réserve des droits des créanciers privilégiés et hypothécaires ». En d’autres termes, le propriétaire ne disposant plus de son bien, il ne peut être tenu pour responsable des nuisances intervenues après la déchéance de ses droits de propriété.

Les articles L 5142-1 à L 5142-6 du Code des transports concernent les épaves. L’article L 5142-1 énonce que « L'état d'épave résulte de la non-flottabilité, de l'absence d'équipage à bord et de l'inexistence de mesures de garde et de manœuvre, sauf si cet état résulte d'un abandon volontaire en vue de soustraire frauduleusement le navire, l'engin flottant, les marchandises et cargaisons ou l'aéronef à la réglementation douanière ». L’article L 5142-2 précise que « dans les cas prévus par l'article L 5242-18 ou lorsque l'existence de l'épave remonte à plus de cinq ans, la déchéance des droits du propriétaire peut être prononcée par décision de l'autorité administrative compétente ». L’article L 5142-3 indique « qu’il peut être procédé à la vente de l'épave au profit de l'Etat : 1° Lorsque le propriétaire ne l'a pas réclamée ; 2° Lorsque le propriétaire a été déchu de ses droits en application des dispositions de l'article L 5142-2. Les conditions d'application des dispositions du présent article sont fixées par décret en Conseil d'Etat ».
L’article L 5142-4 énonce, quant à lui, que « dans le cas où l'épave est constituée par un navire et sa cargaison, la déchéance et la vente prévues par les articles L 5142-2 et L 5142-3 s'étendent à l'ensemble de cette épave, sans préjudice du recours du propriétaire de la cargaison contre le transporteur et, le cas échéant, contre l'affréteur ». Enfin, l’article L 5142-5 prévoit que « la créance des sauveteurs ainsi que celle des administrations qui ont procédé aux travaux de sauvetage est garantie par un privilège sur la valeur de l'épave de même rang que le privilège des frais pour la conservation de la chose ».